lundi 19 avril 2010

A PROPOS D'HISTOIRES DU NORD ...

Bon... voilà, le moment tant redouté arrive... On est à l'extrême-limite des capacités gratuites de stockage... Une seule alternative, soit acheter une capacité de stockage plus élevée, soit créer un nouveau site à partir d'une nouvelle adresse courriel d'inscription... Pragmatique car Flamand, je me demande pourquoi payer alors que cela peut être gratuit, comme d'ailleurs est le site lui-même...


Aussi, Histoires du Nord trouvera sa suite logique dans Histoiresdunord 2 !



L'adresse http://histoiresdunord2.blogspot.com/ est effective depuis quelques heures et vous trouverez la suite de ce modeste blog sur ses pages...


Mais rassurez vous, je ne ferme pas le premier site pour autant, vous y aurez toujours accès, pourrez poster des commentaires, utiliser liens et archives, etc.


Voilà, restent quelques détails techniques à régler puis les nouveaux clichés et articles seront ensuite sur Histoiresdunord 2... Patience, patience...

dimanche 18 avril 2010

« L'amiante, on pensait que c'était un produit qui nous protégeait »

Claude Tange montre un tablier en amiante,
l'une des pièces des anciennes tenues de protection des salariés de l'Usine des Dunes.

Claude Tange préside l'Association de défense des victimes de l'amiante de la sidérurgie Usine des Dunes (ADVASUD)-CGT. Pour lui, chaque mot compte. Depuis dix ans, il se charge de le rappeler, en mémoire du temps passé au contact de la fibre tueuse.
PAR LAURENT LEYS

D'un grand sac en plastique, Claude Tange sort un long manteau en amiante, un tablier en amiante, des gants en amiante et une paire de sandales à l'épaisse semelle de bois doublée d'une couche d'amiante. De l'amiante partout ! «On pensait que c'était un produit qui nous protégeait. Il était obligatoire de porter ces équipements pour éviter les brûlures et les projections de métal ou pour marcher sur les plaques chaudes, sinon c'était un avertissement ! Personne ne nous a dit que c'était dangereux.» Il en parle comme de «pièces de collection» - remplacées depuis quelques années par des tenues avec de l'aluminium -, puis ajoute : «des pièces à conviction». Il les verrait bien produites comme preuves dans un procès en correctionnelle ô combien attendu ! Un procès qui dénoncerait «la criminalité industrielle» de «patrons» davantage attachés à dégager des bénéfices qu'à préserver la santé de leurs salariés.

«L'étiquette CGT inscrite dans nos statuts»

On reconnaît là l'argumentaire de la CGT, mais comment s'en étonner ? «Notre nom - Association de défense des victimes de l'amiante de la sidérurgie Usine des Dunes-CGT - parle de lui-même. L'étiquette CGT est inscrite dans nos statuts.» On lui rappelle la question posée par un adhérent qui assistait à une assemblée générale il y a quelques années : «Est-ce que le sigle du syndicat ne dissuade pas les victimes de venir nous rejoindre ?» «Je m'en souviens. Je lui avais répondu : "La porte de l'association est ouverte pour entrer, elle est aussi ouverte pour sortir".» Et vlan !

Claude Tange ne s'embarrasse pas de périphrases. Il suffit de l'écouter parler des conditions de travail dans l'usine sidérurgique de Leffrinckoucke qu'il a connues de 1976 à 1994. «Délégué du personnel et responsable du syndicat», il a, assure-t-il, «fait tous les postes de l'aciérie : fondeur, pontonnier...». «On savait qu'il y avait de l'amiante, partout, dans le process de fabrication, dans la protection des hommes, des outils, des machines. Pour préserver la chaleur dans la poche de coulée, on mettait dessus des sacs d'amiante de 25 kilos. Dans les lingotières, on mettait de la poudre d'amiante. On manipulait les sacs à la main, sans masque.» La matière première amenée dans l'usine pour y être fondue contenait aussi ces fibres cancérogènes : vieilles voitures, anciennes cuisinières, tuyauterie calorifugée d'entreprises démontées...

«L'amiante ne fait pas le tri dans le personnel»
Terminée, cette période ? Pas du tout ! Les maladies, parmi lesquelles les cancers de la plèvre et du poumon, peuvent se déclencher des dizaines d'années après l'exposition sans protection des voies respiratoires. Et sans distinction : «L'amiante ne fait pas le tri dans le personnel : cadres, ingénieurs, techniciens, agents de maîtrise...» énumère Claude Tange.
Depuis juin 2000, il préside l'ADVASUD-CGT qu'il a fondée. «Au départ, on était 26 membres, aujourd'hui plus de 500. En dix ans, on a enregistré 87 décès parmi nos adhérents.» •
in LA VOIX DU NORD, édition de Dunkerque du 18 avril 2010

mercredi 14 avril 2010

Dunkerque, ville-forte

Après la guerre de 1870, la France découvre la faiblesse de ses défenses. Les villes sont devenues de vastes usines à préserver des ennemis. Il faut les entourer de forts pour empêcher de les approcher. Dunkerque n’apparaît pas comme une priorité car dans les années 1870-1880, nul n’imagine que l’Allemagne ose un jour violer la neutralité belge.

Des batteries côtières ont été construites à partir de 1878 pour défendre le port. La ville a bien une enceinte édifiée entre 1818 et 1848, agrandie en 1849, 1852 et en 1861 mais la guerre de 1870 a ralenti les travaux qui reprennent entre 1878 et 1883 : il faut réorganiser la défense côtière à cause des perfectionnements de l’artillerie et de la Marine. Dunkerque devient une place hybride avec des forts prévus pour le front de terre et le front de mer.

Vers la mer

La Batterie de Zuydcoote est finie en 1879. Rectangle bordé d’un parapet épais de 10 mètres, bordé de fossés secs, les abords sont défendus par deux caponnières à ciel ouvert, pour flanquer le fossé et une digue de protection à moellons est posée sur la plage pour éviter que les murs ne soient sapés par le ressac. C’est un ouvrage à batterie haute forte de 10 puissants canons mais le casernement, pour 128 hommes, n’est pas à l’épreuve des bombes, un magasin à poudre de 33 m² abrite 17.600 kg de poudre et une citerne de 75 m3 assure le ravitaillement en eau. Un poste de garde avec un pont roulant de 3 mètres de large défend l’entrée alors qu’une route de 10 mètres de large le relie au Fort des Dunes… En 1893, une nouvelle poudrière bétonnée semi-enterrée est élevée. Sous une carapace de 3,5m d’épaisseur, elle stocke 19.442 kg de poudre. Près de la batterie, le sémaphore de Zuydcoote est élevé en remplacement de la Tour des sables, vestige de l’ancien village. En 1900, un projecteur est ajouté, puis de 1913 à 1920, de nouveaux canons, plus puissants, remplacent les premières pièces.

La batterie de Mardyck est construite en 1878. De forme rectangulaire, le parapet de 10 mètres d’épaisseur est protégé par un fossé en eau. L’accès se fait par deux ponts de bois sur pilotis. Ici aussi, une caserne est construite pour 115 hommes que rien ne protège des bombes. 6 canons de 240 mm sont installés et sont renforcés par une batterie annexe de 4 pièces avec des abris bétonnés et deux poudrières pour 50 tonnes de poudre en 1884, auxquels s’ajoutent, en 1901, 8 canons de plus petit calibre.

L’enceinte de Dunkerque
Ville et port à la fois, Dunkerque est protégé par un fossé sans revêtement avec des perrés jusqu’au plan d’eau. Les bastions qui regardent la mer, numérotés de 5 à 28, sont coiffés par des pièces d’artillerie. A partir de 1892, deux postes de commandement en béton sont réalisés et complétés par un observatoire sous coupole d’acier. Les hommes sont alors casernés aux bastions 28 (54 hommes) et 32 (32 hommes) et dans la courtine 32-5 (où se trouve le mémorial de l’opération Dynamo), pour 104 soldats. Le bastion 5 est transformé en poudrière : le magasin en béton contient 100 tonnes de poudre. Quant au front de terre, un magasin à poudre non bétonné, pour 100 tonnes, est établi dans les bastions 18, 20 et 21.

Le front de terre

Le fort des Dunes est construit en arrière de la batterie de Zuydcoote à partir de 1878. Son rôle est simple : interdire l’accès à Dunkerque par la voie ferrée venant de Belgique et le canal de Furnes. Construit selon un modèle de fort à terre, c’est un fort à massif central et batterie basse dont la caserne accueille 188 hommes. En 1900, une poudrière en béton armé est construite pour 100 tonnes d’explosifs.

La loi du 24 décembre 1903 modifie la défense du port qui doit accueillir de nouvelles darses et un nouveau canal exutoire. On projette de supprimer l’enceinte à l’ouest et de la remplacer par la construction de l’ouvrage ouest et le fort de Petite Synthe. Seuls les forts sont bâtis. On creuse aussi un canal défensif depuis le sud de la ville, passant par le fort de petite-Synthe et qui aboutit à l’ouvrage ouest. Ce dernier est bâti de 1908 à 1911. Plus récent, il accueille une casemate de Bourges pour deux canons de 75 mm qui couvrent le Fort de Petite-Synthe. Une caserne de béton abrite 220 soldats et deux caponnières défendent la position en plus d’un fossé en eau. Défendu côté mer par 7 canons de fort calibre, dirigés par deux postes de commandements bétonnés. 4 canons de 120 mm regardent vers la terre. Plus loin, à 1.200 mètres au sud, une poudrière pour 100 tonnes d’explosif est élevée en 1911-1912.

Reste le fort de Petite Synthe, en grande partie construit de 1906 à 1908. Le large fossé en eau protège un fort triangulaire construit en béton armé, avec une dalle d’1,60 mètre d’épaisseur. Une casemate de Bourges protège le flanc droit et couvre l’ouvrage ouest, deux tourelles à mitrailleuses le coiffent ainsi qu’une tourelle blindée pour deux canons de 75 mm qui sont renseignés par deux observatoires cuirassés. De plus, quatre canons de 120 mm sont posés pour couvrir le front de terre. Le fort accueille 180 hommes…

Et plus loin ?
Conçue comme un camp retranché, la position de Dunkerque abandonne plus ou moins les forts Louis et Vallières qui sont déclassés en 1889. Bergues devient un fort d’arrêt par l’aménagement de la couronne de St-Winoc en 1879, modifiée pour l’artillerie rayée, avec deux nouveaux casernements et une poudrière. Quant à Gravelines, la place reprend du service en 1877 avec une poudrière bâtie au pied de la citadelle et de nouvelles casemates en complément des casernes.

La grande guerre vit ces fortifications s’emplir de soldats. Elles connaissent le baptême du feu et l’occupation entre 1940 et 1945 pour ensuite tomber en désuétude. Devenues inutiles, elles sont abandonnées, tombent en ruines ou détruites comme l’ouvrage ouest, rasé pour faire place à Usinor… De toute façon, Dunkerque n’est plus ville de garnison.

mardi 13 avril 2010

Le Lion des Flandres et la naissance de la littérature flamande



La bataille des éperons d’or est un moment important tant l’histoire des Flandres que dans l’esprit flamand, tant et si bien qu’elle sert de fête de la communauté flamande. Et qu’elle est perçue comme une véritable fête nationale.
Occasion est donnée par la republication du Lion des Flandres d’Hendrik Conscience pour revenir sur l’événement et les symboles qu’il véhicule encore aujourd’hui.

I. La bataille de Courtrai, événement majeur de l’histoire flamande
II. Hendrik Conscience et la littérature flamande
III. Les symboles, ce qui reste.


I. La bataille des Eperons d’Or

Un contexte politique difficile
La France de la fin du XIIIe siècle continue son expansion en se heurtant à l’Angleterre. Affront au Roi de France que ce royaume. Tenu par des vassaux de la couronne de France, il devient un concurrent sérieux, pis encore, le roi anglais a de nombreuses possessions sur le continent.

Ce royaume connaît alors une croissance économique sans pareille, les éleveurs anglais fournissent les tisserands flamands dont les draps sont renommés mondialement. Les transactions se font grâce à des négociants qui détiennent un véritable monopole dans ce rôle d’intermédiaires obligés. Autant dire que leurs fortunes sont assurées !

La Flandre, tête de pont anglaise sur le continent, c’est difficile, impossible même à accepter pour les Capétiens. Surtout que cette Flandre est riche. Ses draps se vendent jusque Kiev, ses terres lourdes nourrissent une population nombreuse, ses villes sont très peuplées…

Les villes drapières connaissent un succès sans égal. Des cités comme Ypres ou Bruges voient naître une puissante bourgeoisie qui s’impose dans les échevinages au détriment des artisans et de la noblesse.

Forte d’un mouvement de franchises déjà ancien, les beffrois surplombent les villes et les échevins dirigent les communes d’égal à égal avec le Comte de Flandre. Comme il se dit, les Bourgeois s’arment en milices pour défendre leurs murs, leurs familles mais aussi et surtout leurs droits, leurs privilèges et leurs franchises.

Malheureusement, en 1294, les Flamands modifient leur façon de faire : les artisans peuvent se passer de l’intermédiaire des négociants flamands en laine anglaise. Deux ans plus tard, en 1296, Edouard Ier impose un embargo à l’exportation des laines, plongeant les villes flamandes dans le marasme financier.

L’année suivante, le Comte Guy de Dampierre négocie une alliance avec les Anglais pour lever l’embargo.


Philippe IV de France, ne voulant pas d’une influence anglaise croissante aux portes du Royaume, attire le Comte de Flandre à Paris et l’emprisonne, le remplace par un fidèle, Jacques de Chatillon, et s’allie les bourgeois qui veulent récupérer leur monopole.
Les bourgeois pro-français, les "Leilaerts" (les «hommes des Lys») ouvrent alors les portes de leurs villes aux armées royales. La France semble en passe d’annexer la Flandre

Les mâtines brugeoises
Le tisserand borgne Pierre De Coninck et le boucher Jan Breydel sont eux des "Klauwaerts", des «hommes de la griffe», fidèles du Comte Guy.

Comme d’autres artisans, ils se révoltent et sous la conduite de De Coninck, se révoltent dans la nuit du 17 au 18 mai 1302, pour les mâtines de Bruges, avec environ 1.600 Brugeois.


Demandant aux français «s Gilden Vriend ?», celui qui ne savait répondre qu’il était ami des Guildes était alors immédiatement passé au fil de l’épée. Comme lors des Vêpres Siciliennes, les Français sont en fâcheuse posture. On estime que l’insurrection cause la mort d’un millier de Français.

La vengeance de Philippe le Bel
Il est évident que le roi de France ne peut laisser l’affront impuni : l’Ost royal est envoyé en Flandre.

Forte d’environ 45 à 50.000 soldats, parmi eux, 10.000 chevaliers, l’armée française se porte au devant de 25.000 Klauwaerts qui les attendent dans la plaine de Groeninghe, aux portes de la ville de Courtrai, adossés au château, sur un terrain marécageux et bordé de fossés.

C’est que la ville est tombée entre les mains des Flamands de Gui de Namur et les Français se sont réfugiés dans le château, attendant les secours de l’armée royale.

Aux Flamands de gagner le maintien de leur indépendance. Comme le port de l’épée est réservé aux chevaliers, les milices flamandes sont armées d’une lance terminée par une pointe acérée, le goedendag. Voilà encore une autre façon de combattre …


Postés sur la colline de Mossemberg, les Français prennent l’initiative de l’offensive. Les arbalétriers et les archers italiens fauchent les premières lignes flamandes surtout constituées de paysans. La piétaille française se lance contre les Flamands.

Le chef du Parti Français, le comte Robert d’Artois les fait suivre par sa cavalerie qui, méprisant la valeur de la piétaille de Flandre, bouscule même se propres fantassins et part se perdre dans un terrain détrempé ou termine sa course dans les fossés emplis d’eau derrière lesquels se sont reconstituées les troupes flamandes.



Robert d’Artois, cerné, offre de se rendre contre rançon mais les Flamands, en colère ou ignorants des lois de la chevalerie, le tuent immédiatement.

Ses chevaliers, trop lourds, s’embourbent.

La charge est un désastre pour les Français : les chevaliers sont désarçonnés et massacrés.
Le Comte de Saint-Pol, voyant la mauvaise tournure des événements, préfère encore tourner les talons et fuir en France. On pense que seuls 3.000 Français ont échappé au massacre.



Après la bataille, les Flamands ramassent 500 éperons d’or sur les cadavres des chevaliers, qui ornent le jour même les voûtes de l’église Notre Dame. Ils ne sont pas seuls à fêter la victoire au soir de la bataille, car parmi eux, l’on trouve nombre de Brabançons et de Namurois venus leur prêter main forte.


Une aide précieuse oubliée aujourd’hui dans le contexte de l’utilisation politique de la bataille mais qu’en son temps, l’historien Henri Pirenne avait qualifié de première manifestation de l’unité belge.

Courtrai est un succès. Au abords de Groeninghe, les milices ont taillé en pièces la fine fleur de la chevalerie française, le lion a écrasé le lys de France…

Victoire importante pour la Flandre qui voit Jacques de Chatillon remplacé par Robert de Béthune, le propre fils de Guy de Dampierre. Les comtes sont donc rétablis en leurs droits…

Courtrai, c’est surtout l’éclatante victoire du petit peuple contre les puissances politiques et les élites économiques.

A partir de cette date, le mouvement de libération gagne de nouvelles villes.

Quant à Philippe le Bel, il a perdu plus qu’une bataille : tout d’abord le prestige, une grande part de sa chevalerie et surtout ses illusions quant à la valeur des Flamands.
L’affaire est d’une telle importance que le pape Boniface VIII se fit même réveiller en pleine nuit pour entendre le récit de l’exploit flamand…

La paix
Les Français prennent leur revanche en 1304 à Mons-en-Pévèle. D’ailleurs le roi s’y bat en première ligne…

Charles VI lavera l’affront dans le sang à West-Rozebeke en 1382 : il vient reprendre les éperons, qui rejoignent une église de Dijon… et incendie la ville.

Le 23 juin 1305, par le traité d’Athis-sur-Orge, Philippe le Bel annexe les villes de Lille, de Douai et de Béthune et fixe alors la frontière qui dure encore aujourd’hui.

D’abord, faire payer les Brugeois et leurs mâtines : Philippe le Bel se voit autorisé à déporter 3.000 Brugeois, soit le dixième de la population pour les forcer au repentir par des pèlerinages. Une chance pour Bruges, c’est que ce qui aurait fait la ruine économique de la cité est commué en 1307 en une amende de 300.000 livres ?

Dans les villes, les métiers s’imposent au pouvoir communal et les villes prospèrent, se peuplant encore. Une croissance qui dure jusqu’à l’insurrection contre Maximilien d’Autriche, veuf de Marie de Bourgogne, en 1482, échec qui entama le déclin brugeois.

D’autres révoltes
C’est que la Flandre a encore la capacité de se révolter. Quelques décennies plus tard, c’est Gand qui connaît l’émotion populaire.
Son gouverneur Guy de Nevers commet l’erreur de faire alliance avec la France qui entre en guerre contre l’Angleterre. La Guerre de cent ans vient de commencer.

Evidemment, les Anglais arrêtent dès 1336 le commerce de la laine avec les villes flamandes. Gand en tire l’essentiel de ses revenus, toute la région connaît la ruine. Jacques van Artevelde sauve la situation en signant une nouvelle alliance avec l’Angleterre en rencontrant Edouard III à Anvers en 1339 mais plus encore, il signe avec les autres provinces les «Traités de 1339» dans lesquels les provinces se promettent assistance et monnaie commune… sans l’aval du roi de France.



Cependant, en désavouant son Comte, en proposant au roi d’Angleterre d’offrir la France à son fils le futur Prince Noir, il ne cesse d’accumuler haines et rancœurs et est assassiné en juillet 1345. L’indépendance Gantoise est finie, la ville se jette dans les bras du roi de France. Pourtant, les malheurs des temps ruinent ces efforts, notamment avec les désastres de la Grande épidémie de peste du milieu du XIVe siècle…


II. Le lion de Flandre et Hendrik Conscience

Le livre d’Hendrik Conscience participe du même contexte que l’ouvrage de Decoster, Till Ulenspiegel, une période où la jeune Belgique se cherche mais où les Flamands restent pauvres et sans réel poids politique…

Fils d’immigré




Hendrik est le fils de Pierre Conscience, un natif de Besançon venu comme chef de la Timonerie dans la Marine de Napoléon, et qui devint sous-directeur du port d’Anvers en 1811.

La ville perdue par la France ne perd pas la famille Conscience qui décide de rester. Pierre achète des navires hors d’usage, les démonte et vend des objets maritimes dans une petite boutique où de nombreux romans nourrissent les rêves d’Hendrik.

Sa mère décède en 1820 mais son père se remarie en 1826 avec une veuve plus jeune que lui. Peu après le mariage, son père décidant qu’il ne supporte plus la ville, vend son commerce et se retire entre Anvers et Venloo.

Les années révolutionnaires
Vers l’âge de 17 ans, Hendrik quitte le foyer familial pour Anvers où il entreprend des études bouleversées par la révolution de 1830. Il s’engage dans la nouvelle armée belge jusqu’en 1837, année où il quitte le service avec le grade de Sergent-major.

A fréquenter les Flamands, il décide alors d’écrire dans cette langue si méprisée dans un pays où seul le Français permet l’ascension sociale.

Il n’est pas le seul d’ailleurs : en 1832, Blommaert avait publié ses «remarques sur la déconsidération du néerlandais» dans lesquels il préconisait l’usage du Flamand dans les administrations de la province et les publications officielles pour que les néerlandophones accèdent aussi aux rouages de l’Etat.

Ses poèmes, écrits au service, sont cependant tous en français. Déterminé et aux abois car au chômage, il publie un premier ouvrage en Flamand mais son père est tellement choqué qu’il le jette dehors.

Un de ses anciens camarades d’école le recueille et rapidement, il devient la coqueluche des gens de la haute société. Le roi Léopold Ier ayant décidé que son ouvrage serait dans toutes les bibliothèques scolaires, le patronage royal lui réussit.

Un poste aux archives provinciales lui permet d’avoir des revenus réguliers à partir de 1837.

Reconnaissance et prospérité
En 1838, il publie Le Lion de Flandre, son roman historique le plus célèbre suivi de plusieurs autres romans… La reconnaissance arrive mais pas la fortune… et il faut attendre de longues années avant qu’il ne puisse vivre de son art.



Lors d’un congrès flamingant en 1841, ses écrits sont présentés comme le germe d’une littérature nationale.

En 1845, Hendrik est fait chevalier de l’Ordre de Léopold et commence à avoir des imitateurs.

En 1867, le poste de gardien des musées royaux de Belgique est créé. C’est à lui qu’on attribue cette puissante fonction et continue de produire des nouvelles avec régularité. Au total, il en publiera 80. Fêté par sa ville, il décède à Ixelles en 1883.


III. Des symboles qui restent…

Le livre est à l’origine d’un vaste mouvement de reconquête pour l’identité flamande. Ainsi que nous l’avons vu plus haut, il est le point de départ de la reconnaissance de la langue flamande, facteur de stagnation voire de régression sociale.

La Flandre est pauvre, la plupart de ses paysans quitte le pays pour la France autant à cause des crises du textile que de la maladie de la pomme de terre pour aller grossir les rangs du prolétariat lillois.

Cette ségrégation trouvera son illustration la plus terrible dans les tranchées de l’Yser lors de la Première Guerre Mondiale. Les gradés donnent leurs ordres en français à des soldats qui ne le comprennent pas…



Un mythe fondateur
Le romantisme du XIXe siècle en fait un des mythes fondateurs de la nation flamande.

Ce que montrent d’ailleurs les manifestations qui se créent autour de l’événement. Le mouvement flamingant évacue la dimension sociale au profit de la dimension nationale. Il est vrai que de rappeler la présence namuroise n’aide pas à parler d’une révolte spécifiquement flamande.

Dès le XIXe siècle, la bataille des éperons d’or est opposée comme modèle de résistance face aux visées impérialistes des Français. Limite même de la caricature, cette identification des Fransquillons aux Leilaerts et des Klauwaerts aux Flamingants permet de mettre sur pied une théorie simple :


- la Belgique est et sera toujours un terrain de bataille entre deux communautés que même l’histoire oppose,
- les Flamands ont toujours été des résistants face au pouvoir central, français ou francophone qui les brime ou les asservit
- Ceux qui gardent à l’esprit la dimension sociale du 11 juillet 1302 ajoutent que durant la révolution industrielle, les mines et l’industrie sont en Wallonie, la Flandre reste le parent pauvre, une Flandre plus rurale. Grâce à sa puissance économique, la bourgeoisie wallonne confisque le pouvoir et les postes stratégiques.

Le choix des symboles parle de lui même : la communauté française a choisi de fêter les journées de septembre 1830 mais les Flamands, communient dans la célébration des éperons d’or.

D’ailleurs, nombre d’observateurs pensaient que les partis les plus extrémistes annonceraient la scission de la Flandre le 11 juillet 2002.

Néanmoins, le symbole reste des plus forts car à titre historique, il n’en reflète pas moins une réalité : la Flandre, que l’on considère ou pas la frontière avec la France a une histoire forte, une histoire et donc une mythologie commune, avec des références simples et explicites que n’ont pas les Wallons. La bataille des éperons d’or occupe donc une place à part dans la mémoire comme dans l’imaginaire flamand.

La lutte du petit peuple contre le peuple gras, ce que Michel Rouche qualifiait en reprenant l’exemple italien du minuto populo contre le grosso populo connaît aujourd’hui des résonnances particulières avec la crise économique. La crise de 1973 a mis la Belgique cul-par-dessus-tête. La Wallonie, de vieille industrie du XIXe siècle, connaît une crise profonde et vit sous perfusion grâce à la Flandre. Les antagonismes sociaux et politiques des éperons d’or reprennent toute leur force. La formulation reste simpliste mais terriblement efficace et, au final, se trouve aux antipodes de ce que fut le mouvement de révolte urbaine du XIVe siècle.




Le Lion des Flandres a été réédité chez Yoran Embanner, 631 pages, 2007, Fouesnant, ISBN 2-914855-44-3

lundi 12 avril 2010

La Grande Guerre, de Lille aux Weppes, nouveau chemin de tourisme et de mémoire

Aurore Rouffelaers et Frédéric Boulet (agence Atout-Nord). PHOTO PATRICK JAMES

Le tourisme de mémoire est, chez nous, une idée encore assez nouvelle. Sur ce constat, Aurore Rouffelaers, guide-interprète, a proposé à l'office de tourisme de Lille un circuit de découverte de la Grande Guerre dans les Weppes.
La ligne de front a beau avoir passé, quatre ans durant, à une vingtaine de kilomètres de Lille, personne, ou presque, ne semblait s'en souvenir - même si, pour l'anecdote, les historiens n'ignorent pas qu'Adolf Hitler, alors caporal-estafette, y a séjourné quelques mois en première ligne en 1915

Et puis est survenue l'affaire de Fromelles au printemps 2008 : plusieurs centaines de corps, australiens et britanniques, repérés dans des fosses communes datant de l'été 1916. À la suite des grandes opérations d'identification menées l'été dernier par des équipes d'archéologues, historiens et médecins légistes venus de Londres et Canberra et une première inhumation en janvier, une cérémonie officielle sera organisée le 19 juillet. C'est le jour anniversaire de la bataille de 1916 qui fit, en moins de vingt-quatre heures, 5 500 morts, blessés ou disparus chez les Australiens, 1 400 chez les Britanniques, 1 200 chez les Allemands.

Mesurer la tragédie

Les dépouilles de 250 soldats trouveront leur dernière demeure dans une nécropole. «Ce sera sans doute la dernière cérémonie de ce genre concernant ce conflit : les Australiens vont y accorder une place énorme», souligne Annette Becker, historienne de la Grande Guerre.
C'est dans ce contexte très particulier qu'Aurore Rouffelaers envisage ce circuit inédit. «Expliquer combien cette terre a été marquée par le conflit est une chose. Raconter, sur les lieux mêmes, permet aux visiteurs de prendre toute la mesure de la tragédie.» Un circuit qu'elle a conçu avec l'agence Atout-Nord (Liévin) en partenariat avec le comité régional de tourisme (via le label Chemins de mémoire 14-18) et l'office de tourisme des communes du pays de Weppes à Fournes-en-Weppes.

Au départ de Lille (9 h 30 le dimanche), le circuit propose une série d'étapes à Fromelles (le cimetière, le mémorial australien), Neuve-Chapelle, Aubers (secteur allemand), La Bassée, pour terminer au cimetière portugais de Richebourg et au mémorial indien de Neuve-Chapelle. «À chaque halte, on évoquera la mémoire des lieux, en parlant de ces jeunes garçons venus mourir tellement loin de chez eux.»
Sur le plan concret, ce circuit (bilingue) sera proposé chaque dimanche jusque fin septembre (sauf le dimanche de la Braderie) : les inscriptions, individuelles, se font à l'office de tourisme de Lille ou de Fournes-en-Weppes (44 E).

Ce type de tourisme est très pratiqué par les Belges, notamment autour d'Ypres, autre terrible champ de bataille de la Grande Guerre. Prise en compte très contemporaine de la réalité d'une histoire terrible, déjà très ancienne (le dernier Poilu est mort il y a deux ans), mais toujours ancrée dans la mémoire de cette partie de la Flandre. •

JEAN-MARIE DUHAMEL
in LA VOIX DU NORD, édition régionale du 12 avril 2010

Office de tourisme de Lille : Tél : 0 891 56 2004.
Office de tourisme des communes du pays de Weppes : Tél : 03 20 506 385.

samedi 10 avril 2010

25 bougies pour le Cirque Gruss

Les 25 ans du Cirque Gruss, hormis une tournée dans la région, ont aussi été marqués par l'attribution du nom d'Arlette Gruss à un des chemins autour de la citadelle de Lille. Début avril 2010, le chapiteau s'est posé à Dunkerque. Trouvez ici une première série de photos, que d'autres compléteront dans les jours qui suivent... ainsi que certaines artistes sur Belles du Nord...

entre tradition et innovation









Respect des traditions





exotisme des charmes de l'Asie