dimanche 31 décembre 2006

Quand la cathédrale de Lille n'était même pas un projet

Quand on connaît Lille, on sait qu'avant 1848 se dressait dans le Vieux-Lille la Motte-Madame à l'emplacement de l'actuelle cathédrale, siège épiscopal depuis 1913... Arasée en 1848 par les Ateliers Nationaux, elle n'est plus visible que sur le plan-relief conservé au Musée des Beaux Arts... Le meilleur résumé sur son histoire reste encore le rapport établi par Bovet (ADN / B 19803 n° 1103)


Département du Nord
3° division
N°1103 agenda


Renvoyé à l’archiviste du département pour qu’il fasse des copies par extraits
des dénombrements et comptes indiqués dans l’avis ci-contre, le tout sur papier libre
Lille, le 2eme juillet 1810
le Général Préfet
signé Pommereceul
reçu le 23 juillet


Administration de l’enregistrement et des Domaines
Lille, le 22 juin 1810

Le directeur de l’enregistrement et des domaines
à Monsieur le Général de division, Baron de l’Empire,
Préfet du Département du Nord

Général Préfet,

La pétition du sieur Demilly et autres, que vous m’avez communiquée le 13 de ce mois, a pour effet de déterminer la compétence dans la question à décider, et d’établir que les objets litigieux sont la propriété des reclamans. Ce dernier point rend les pétionnaires fondés sur le premier puisqu’il s’agit d’une contestation de propriété, qui doit être portée devant les tribunaux et soutenue par vous, d’après les lois des 15 9bre et 19 décembre 1790, 27 mars, 12 7bre et 9 8bre 1791 et 19 nivôse an 4.

Il ne reste donc qu’à examiner jusqu’à quel point peut être fondée la préténtion de propriété.
On ne donne pour l’appuyer d’autres moyens que l’impossibilité où l’on croit l’adminsitration de produire les siens, cependant il est certain que les opposans ne peuvent être propriétaires des maisons dont s’agit. En voici la cause.

Ces maisons procèdent ordinairement du fief de la cour et halle de Phalempin, relevant du souverain en sa qualité de châtelain de Lille; elles faisaient partie de ce fief. ce fait est prouvé par le dénombrement fait en 1511 à Philippes, archiduc d’Autriche, par Marie de Luxembourg, châtelaine de Lille, veuve de françois de Bourbon, comte de Vendôme. Dans ce dénombrement, il est déclaré appartenir audit fief sept maisons ou plaches depuis la porte d’entrée et les prisons dites de Vendôme y attenantes, le long de la rue Saint-Pierre, louées à divers.
Cette pièce repose aux Archives du Département du Nord sous la lettre D N°375.

Au dénombrement de 1620 à 1623, même déclaration, il repose aux archives sous la lettre L N°131.

Au compte dudit fief de la châtellenie de Lille, cour et halle de Phalempin, pour les années 1634 et 1635, il est fait mention du paiement des arrentemens de ces sept maisons et des prisons. ce compte est aux archives du département sous la lettre P N°8.K

Au compte de 1657, rendu par Simon de Rosendal, de la recette des revenus et Biens appartenant au Roi de France en la ville de Lille, à cause de sa cour et halle de Phalempin et confisquée à cause de la guerre, il est encore fait recette des arrentemens desdites sept maisons et des prisons y attenantes: ces dernières sont annoncées avoir été brulées pendant la guerre; et il résulte de ce compte que lesdites maisons et prisons avaient été précedemment arrentées pour dix ans, expirés en 1648, à la Noël, qu’à cette époque, les arrentemens ont été renouvellés pour 59 ans et adjugés à divers, aux prix et conditions désignés avec les noms des adjudicataires, audit compte f°21, 22, 23, 24, 25, 26, 27, 28, 29 et 30; la maison de la Motte-Madame et les jardins ont été loués en même temps à divers, ce compte est aux archives, sous la letrre L n°604.

Il est bon d’observer que Henri IV avait réuni au Domaine de la Couronne la châtellenie de Lille, cour et halle de Phalempin, qui était son patrimoine personnel par l’édit du mois de juillet 1607.
Il est clairement démontré par ces titres que l’emplacement actuel de la Monnaie, du cirque, ainsi que la Maison de Mr. Louis, negt au lieu des Dominicains, était autrefois le siège de la cour et halle de Phalempin et de la maison du châtelain, dite la Motte-Madame, ainsi désignée à cause de la longue possession de Marie de Luxembourg, pendant 52 années de veuvage. L’identité des lieux ne pas être plus contestée que leur Domanialité.

Il est également prouvé que les sept maisons ont été données à diverses époques en arrentemens terminatifs, dont le dernier est expiré à la Noël 1707.

C’est ici que finit la filiation qu’on a suivie jusqu’en 1707. Peut-être à cette époque les arrentemens ont-ils été renouvellés et sont-ils expirés dans les orages de la révolution, c’est ce qui pourroit être présumé, peut-être aussi la jouissance s’est-elle continuée par tacite reconduction: cette dernière supposition s’induirait du défaut de titre après celui indiqué sous la lettre L n°604, et des paiemens faits jusqu’en 1707. Dans l’un comme dans l’autre cas, la prétention des reclamans serait dénuée de mérite, et il demeurerait certain qu’ils ne sont qu’arrentataires.

Il est une troisième supposition: les Domaines de la couronne étaient inaliénables, comme la propriété en était imprescriptible, s’il existait un autre titre postérieur en faveur des pétitionnaires, ce titre ne pourrait être qu’un engagement de Domaine, susceptible de l’application de la loi du 24 ventôse an 7, aux dispositions de laquelle les reclamans n’ont pas satisfait.

Dans cet état, je pense, général préfet, qu’il convient de vous faire délivrer copie des lettres ci-dessus énoncées, pour appuyer votre mémoire, et de faire signifier le dernier, comme ayant été maintenu par la reconduction tacite. Par ce moyen, ou les opposans produirons un acte plus récent, ou ils n’en produiront pas; dans le premier cas, la conduite du Domaine dépendrait des circonstances mises au jour, dans le second, les réclamans seraient forcés de reconnaitre la validité des droits du Domaine.

Tels sont, Général Préfet, les renseignemens su’il est en mon pouvoir de vous donner. Si par la suite, sous sentez le besoin d’être instruit sur d’autres points, je m’empresserai de vous fournir sur votre demande, tous les documens qui dependront de moi.
Au surplus, les reclamans se sauroient opposer aucune precription, ni l’axiome je possède par ce que je possède, attendu qu’on ne prescrit jamais contre un titre vicieux.
Je joins ici la pétition de ces particuliers.

J’ai l’honneur de vous saluer avec respect.

signé Bovet

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