samedi 29 avril 2006

En reconnaissance aérienne de St-Pol-sur-Mer

Dans les Avions

6 décembre
Sur la plage de Saint-Pol, où vient de nous déposer l'auto, douze aéroplanes sont rangés, pareils à de gros oiseaux de mer endormis sur le sable. Ce sont des « Voisin », de véritables monstres aux longues ailes grises, au capot large lancé en avant comme une proue de navire. Autour d'eux, les sapeurs s'agitent, portant des bidons d'essence et d'huile; ou bien, grimpés dans les nacelles, donnent un dernier coup d'œil aux moteurs. Les pilotes, arrivés avant nous, surveillent leurs mécaniciens, consultent l'état de l'atmosphère et la vitesse du vent. Depuis une huitaine, ce ne sont que tempêtes et que pluies. Aujourd'hui, le ciel s'est un peu dégagé, les nuages sombres filent très haut. Le jour gris est cependant lumineux. Sans doute, on va pouvoir sortir.

Les voisins LA5 du camp d'aviation de St-Pol-sur-Mer


J'ai été détaché pour quelque temps aux escadrilles de bombardement de Dunkerque. L'habitude de l'air, acquise au cours de mes trois mois d'apprentissage à l'école d'aviation de Reims, m'ont fait désigner pour remplir provisoirement une place vacante. Et l'ennui que j'ai ressenti en quittant mes chers camarades des chasseurs est bien atténué par la joie que j'éprouve à la pensée de recommencer à voler.

Pourvu qu'aujourd'hui le ciel nous soit clément!
Justement, voici mon chef d'escadrille, mon excellent camarade M..., qui vient vers moi, un papier à la main.

- Si le cœur t'en dit, mon cher, je viens de recevoir de l'état-major une demande de reconnaissance sur la ligne de chemin de fer de Dixmude à Gand. Le temps est clair, je t'offre cette occasion de promenade. Comme pilote, tu auras N..., que tu connais bien. Avec lui, tu peux être certain que tout ira bien.

Je connais, en effet, l'adjudant N... C'était l'un de mes pilotes moniteurs à Reims. Je le sais aviateur hardi, calme et expérimenté. De plus, je n'ignore pas qu'il a été cité deux fois à l'ordre de l'armée et qu'il a reçu lp médaille militaire depuis le début de la campagne. Je ne puis confier à un meilleur guide le soin de me mener au-dessus des lignes allemandes.

Le voici qui vient, le visage éclairé d'un large sourire, ses yeux gris brillant de courage et de franchise. Il n'a pas changé. Il a toujours son teint pâle, sa fine moustache blonde et son menton volontaire. Je reconnais sa démarche balancée, un peu lourde, semblable à celle des gens de mer. Nous nous serrons la main très cordialement et j'accepte avec joie de partir avec lui.

- Mon lieutenant, vous ferez bien de vous couvrir chaudement, car je vois que vous avez déjà le nez rouge et les mains violettes. Quand vous serez à 2 000 mètres et que vous ferez du 90, vous verrez qu'il fait un peu plus froid là-haut qu'ici.

Sur ses indications, je revêts un costume qui doit me rendre assez semblable à un Lapon. Je commence par retirer mes chaussures. J'enfile l'une sur l'autre deux paires de chaussettes, je remplace mes brodequins par des snowboots et je mets par-dessus ma culotte un large pantalon de cuir. En dessous de ma vareuse je me matelasse de deux tricots et en dessus je revêts un épais chandail. Je boucle péniblement sur cette quadruple cuirasse le ceinturon de mon revolver, car il faut toujours penser à un atterrissage forcé et l'on doit toujours porter sur soi de quoi défendre sa peau. Sur le tout, on me passe une ample peau de bique.

Complétez cet équipage par le passe-montagne, un épais cache-nez et par le casque, et vous aurez une idée de l'aspect comique que je devais offrir. Mais ici personne ne rit, car on est habitué à semblable mascarade.

Et N... s'est déguisé de la même façon que moi. Je le vois déjà qui grimpe dans son appareil. Je me hâte autant que me permet mon accoutrement, et je me hisse derrière lui dans la nacelle.
Rien ne peut donner une idée du mal que l'on a, ainsi habillé, pour lever suffisamment la jambe. Et pourtant il faut atteindre le premier marchepied et, du deuxième, enjamber le rebord du capot. Enfin, j'y arrive, non sans peine. Dès que le mécanicien de V... a mis le moteur en marche, je m'assois à mon poste d'observateur, bien calé dans le petit siège surélevé à dossier métallique.

Je peux voir ainsi par-dessus la tête de mon pilote, et c'est avec un véritable sentiment de confort que je m'installe et que je boucle la large ceinture de cuir qui me lie à mon siège.
N... essaye son moteur avant de partir. Tandis qu'une douzaine de sapeurs, agrippés aux ailes, maintiennent l'appareil, l'hélice tourne à toute vitesse avec un bruit assourdissant. Toute l'armature vibre sous son effort colossal. L'avion semble se ramasser, prêt à bondir, comme un cheval ardent maintenu par une poigne de fer. Les hommes sont obligés de se cramponner vigoureusement. Ils appliquent leurs épaules contre les longerons, ou bien, les deux bras tendus, le corps'fortement incliné, ils résistent à la poussée du moteur en enfonçant de biais leurs pieds dans le sable de la plage. Tout fonctionne bien et je me réjouis de sentir que, du premier coup, la capricieuse machine a donné son maximum de puissance. Je suis heureux qu'on n'ait pas été obligé de décrasser une bougie ou de vérifier une soupape.

Pas un raté; le ronflement majestueux et assourdissant est admirable de régularité. Il diminue ou reprend à volonté lorsque le pilote le désire. À nous deux, maintenant, mon cher N..., de remplir vaillamment notre mission!

Elle est simple, notre mission. Compter les trains de troupes qui circulent entre Dixmude et Gand, en indiquant sur ma carte l'heure et le lieu de leur passage et le nombre de leurs wagons. A cette hauteur, la seule difficulté est de ne pas confondre les trains de troupes et les trains de ravitaillement. A la hauteur où nous serons obligés de voler, cela n'est pas aisé. On n'a qu'une ressource, c'est de voir quels sont les trains uniquement composés de wagons couverts et quels sont ceux qui comportent à la fois des wagons couverts et des trucs. Ces derniers seuls sont des trains de troupes, car chaque unité qui se déplace en chemin de fer est accompagnée de ses voitures, placées sur des wagons spéciaux. A l'état-major, on déduira du nombre de voitures de chaque espèce l'effectif de la troupe et l'arme à laquelle elle appartient.

N... a mis son moteur au ralenti et a levé le bras. Les sapeurs s'écartent vivement. Et aussitôt, le ronflement reprend toute sa force, l'appareil s'échappe, roule à une vitesse vertigineuse sur le tapis uni de la plage. Il décolle sans que je m'en aperçoive, et nous voici à dix mètres au-dessus du sol. Déjà, nous passons au-dessus du camp d'aviation anglais, établi auprès du nôtre. Je vois, autour de leurs avions, des hommes qui lèvent la tète et se remettent à leur tâche. Notre « Voisin », pris dans un remous et ballotté par le vent, tangue furieusement. Il serait temps de prendre de la hauteur, car nous sommes ici sérieusement secoués. Néanmoins, j'éprouve une véritable volupté à goûter de nouveau l'ivresse de l'air.

Pendant quelques minutes, nous remontons vers le Nord en longeant la côte pour prendre de la hauteur. A gauche s'étend la mer. Elle s'étale à l'infini, formant une immense nappe d'un bleu sombre, où l'on distingue des myriades de petites taches d'écume blanche. Un paquebot, qui nous paraît minuscule, fait route vers l'Ouest. Son sillage forme dans l'eau un triangle plus foncé qui s'étend au loin derrière lui, et l'on peut distinguer d'ici tout un essaim de mouettes, qui semblent l'escorter en tournoyant.

Le moteur ronfle toujours régulièrement. Je voudrais bien pouvoir parler à N..., lui communiquer mes impressions, lui demander des renseignements sur tout ce que je vois de nouveau, car voilà déjà longtemps qu'il navigue, si l'on peut dire, dans ces parages. Mais le bruit est tel que, pour s'entendre, il faut véritablement hurler. Encore les paroles ne s'entendent-elles que difficilement.

Nous sommes maintenant à 300 mètres. N... décrit un brusque virage au-dessus du port. L'avion s'incline d'une façon inquiétante; c'est à croire qu'il va se retourner et tomber dans les bassins, dont j'admire les lignes géométriques et les nombreux bateaux qui semblent de bizarres petits jouets correctement alignés.

Et, aussitôt, malgré la faible hauteur où nous sommes, N... s'engage hardiment au-dessus de Dunkerque. C'est là, évidemment, une audace qui nous coûterait cher si le moteur avait une panne. Mais le pilote a confiance dans sa machine.

Un instant, mon intention se fixe sur lui. Impassible, le dos légèrement voûté, bien assis sur son siège comme un vieux cavalier dans sa selle, il regarde au loin sans s'inquiéter de la ville qui s'agite, vibre et respire au-dessous de lui. Ses deux mains, gantées de fourrure, sont posées sur le « manche à balai » qu'elles tiennent à peine. Je les vois qui oscillent continuellement pour rétablir l'équilibre détruit à chaque seconde par les rafales du vent. Il semble être l'âme même de l'avion. Et il l'est en réalité, ou, du moins, il en est le cerveau qui dirige les muscles, ordonne les mouvements, pense, prévoit et décide. Quelle admirable chose !

Comme j'admire cet être vivant formé de deux êtres différents - vivants tous deux, - le pilote et l'avion.

L'altimètre marque 400. Nous passons au-dessus de la place Jean-Bart, où le marché bat
son'plein. Penché sur le vide, je m'amuse à regarder les baraques bien alignées et le va-et-vient des acheteurs. Mais l'aéroplane file très vite, poussé par le vent qui souffle du Nord et double notre vitesse.

J'admire le pourtour des fortifications qui limitent la ville d'une ceinture verdoyante. Nous les dépassons et nous voici maintenant au-dessus de la campagne. Il faut à présent renoncer à la joie sportive qui m'a seule occupé jusqu'ici, ne plus perdre de vue la carte et le terrain. L'expérience m'a déjà démontré combien l'on se perd facilement quand on vole au-dessus d'un pays inconnu. Il ne faut pas que j'oublie ma mission. Le plaisir du touriste m'est interdit aujourd'hui. Nous sommes en guerre.

C'est vrai: j'oubliais...

Nous laissons le fort Louis à notre droite et piquons directement vers l'Est. Quel étrange pays s'étend en dessous de nous! Des milliers de canaux, de ruisseaux, de chemins, des champs coupés de haies qui forment des entrelacements bizarres. Il faut redoubler d'attention pour ne point se tromper de direction. Heureusement, nous sommes maintenant à 1 000 mètres et je ne perds point de vue le canal de la Basse-Colme, que nous allons couper pour rejoindre la ligne de Furnes à Gand. A partir de là, nous ne quitterons plus la voie du chemin de fer et cela facilitera ma tâche.

Le froid est devenu intense. Malgré mes vêtements superposés, je sens déjà mes mains et mes pieds glacés et mon corps semble suivre peu à peu leur exemple. Je ne m'amuse plus à considérer le paysage qui se déroule à mes pieds. D'ailleurs, à la hauteur où nous sommes, les détails pittoresques disparaissent. Les routes semblent désertes et les villages morts. Il faut se servir de la jumelle pour distinguer les voitures sur les chemins et les péniches sur les canaux.

Et puis, nous approchonsi des lignes allemandes. Je ne puis m'empêcher de songer que, quelques jours auparavant, le sergent-major R..., un des pilotes de l'escadrille, a été abattu par un projectile allemand d'une hauteur de 2 000 mètres. Quand j'étais à terre, tout à l'heure, je ne songeais qu'à la beauté de cette mort.

Maintenant que nous approchons de la ligne de feu, une certaine émotion m'envahit. Ce n'est point la peur, certes: nous en avons vu bien d'autres. Mais une idée me hante. Dans quelques minutes, je vais être au-dessus des tranchées allemandes, dans nne demi-heure je serai au milieu du territoire occupé par l'ennemi.

Si alors un de leurs obus nous frappe et si nous avons une panne, nous serons obligés d'atterrir. Trop éloignés pour pouvoir atteindre les lignes françaises, si nous ne sommes pas tués, nous serons faits prisonniers. Tout plutôt que cela!

Mais je chasse ces pensées moroses. Ma confiance revient vite dans mon étoile. Jusqu'ici la chance m'a singulièrement favorisé. Il n'y a point de raison pour qu'il n'en soit plus ainsi. Et l'ivresse du mouvement me saisit. Je ne songe plus qu'à la délicieuse sensation que j'éprouve à dominer, moi, faible chose, être anonyme, combattant inconnu, ces deux armées qui se choquent.

L'avion semble porté par le vent. Avec lui, il bondit, redescend, s'incline et frémit.
J'éprouve une véritable joie à me dire que, sur ce pays gris sombre qui s'étend au- dessous de nous, des milliers d'hommes ont les yeux fixés sur le petit point noir que nous sommes. Le bruit du moteur a fait lever toutes les tètes. Les yeux ont cherché quelques instants et, bien vite, on a vu se dessiner dans le ciel les deux grandes ailes sombres légèrement incurvées à l'arrière, le gouvernail de profondeur mince et allongé. Les uns ont eu tout de suite un regard de sympathie pour l'oiseau connu qui porte sur ses ailes les couleurs de France. Ils ont senti que c'était un peu d'eux-mêmes qui passait là-haut et s'avançait vers l'ennemi pour les aider, les éclairer dans leur rude tâche.

Instinctivement, ils ont fait des vœux pour le succès de sa mission. Les autres, au contraire, lui jettent des regards de haine. Eux aussi, connaissent bien la forme de cet avion qui avance vers eux. Bien souvent, ils en ont reçu de rudes leçons. Ils le couvent des yeux, se demandent pourquoi on le laisse venir ainsi. Ils souhaitent de voir bientôt les flocons de fumée environner l'appareil. Ils espèrent le voir soudain osciller, s'incliner, tourbillonner comme une feuille morte, puis s'écraser à l'intérieur de leurs lignes.

Justement, nous voici au-dessus des tranchées. Quel aspect bizarre elles présentent d'ici, à 1 800 mètres de hauteur! On distingue très nettement la ligne sinueuse qu'elles forment et les mille ramifications qui s'y rattachent, boyaux de communication, postes d'écoute, cheminements d'accès. On croirait voir deux reptiles monstrueux aux pattes innombrables et inégales qui serpentent l'un à côte de l'autre et dont les corps se rapprochent, se séparent, semblent vouloir se toucher, puis s'éloignent encore. En arrière d'eux, les nombreux épaule-rnents des batteries sont très nettement visibles.

Et voilà que ma contemplation amusée est tout à coup interrompue. Par-dessus le bruit du moteur, j'ai perçu une forte détonation à quelque distance derrière nous. Je regarde N... et je vois qu'il secoue la tête comme s'il voulait dire: Non. Il ne se retourne même pas et continue sa route, les yeux fixés au loin pour ne pas perdre sa direction. Mais je ne puis imiter son calme et je me penche légèrement hors du capot. En arrière de nous, à 400 mètres environ de distance et un peu en dessous, j'aperçois un flocon de fumée jaunâtre, épaisse, ressemblant à un gros paquet de canton que l'on serait arrivé à projeter jusque-là.

Au même moment, j'entends trois détonations plus fortes et trois projectiles éclatent bien plus près de nous, à 200 mètres au plus. J'avoue qu'à ce moment-là, je voudrais bien me trouver ailleurs. Que ceux qui n'ont pas connu cette première rencontre dans les airs avec les obus ne me jettent pas trop vite la pierre. Cette situation n'a rien de commun avec les situations où l'on peut se trouver dans un combat ordinaire.

On peut, quand on est exposé au feu, se jeter à terre, chercher un abri, creuser un trou au besoin.

On peut souvent répondre à l'ennemi, se défendre, lui rendre coup pour coup. On est excité par la lutte, l'esprit est tendu vers la mise à l'exécution du but que l'on se propose: détruire le plus de monde possible en face de soi.

Et puis, l'on se dit: Si je suis frappé, j'aurai quelqu'un des miens, là, tout près de moi, qui m'aura vu tomber, me portera secours si je ne suis que blessé, et qui, si je suis tué, me fermera les yeux, prendra les quelques chères reliques que je garde sur moi et les fera parvenir à ceux que j'ai laissés là-bas, chez nous.

Ici, rien de tout cela. Si, tout à l'heure, un des gros projectiles vient éclater dans l'appareil, ce sera la chute vertigineuse, comme il advint à ce pauvre R... la semaine passée, et il ne restera plus sur le sol que quelques débris sanguinolents dans lesquels les Prussiens fouilleront de leurs grosses pattes, tâchant de trouver nos papiers, nos carnets et nos notes. Et le dégoût me vient à la pensée de ces butors ouvrant mon portefeuille et se passant de main en main, avec des rires gras, des photographies, des médailles, quelques lettres...

Et si, simplement, un éclat vient frapper l'hélice ou le moteur, il nous faudra faire une descente savante en vol plané, tâcher d'arriver à regagner nos lignes quand même. Le pourrons-nous?
Nous avons fait déjà du chemin el le vent sera contre nous. Si nous échouons, ce sera l'interrogatoire subi, ce sera le supplice à supporter les regards gouailleurs, les sourires suffisants, les questions insidieuses. Plutôt mille fois la première catastrophe.

Mais N... s'est retourné, il se penche et regarde du côté des éclatements. De nouveau, sa tête s'agite de gauche à droite. Il me regarde de ses yeux clairs. Il rit d'un rire franc, large, joyeux, et il hurle à mon oreille que j'ai penchée vers lui:

- Pas de danger! Ce sont des obusiers... Ils ne peuvent tirer plus haut que 1 800 mètres... Ah! si c'était leurs canons spéciaux...

Il regarde l'altimètre. Il marque 1 900.

Et maintenant, stupidement, je suis pris d'une sorte d'allégresse, je ris tout haut à la pensée des canonniers qui, à mes pieds, doivent se dire: Nous les tenons! Justement, voici quatre nouveaux obus qui viennent d'éclater encore plus près de nous, mais toujours trop bas. Les détonations paraissent formidables malgré le ronflement du moteur. La fumée épaisse et jaune forme comme quatre écrans opaques destinés à nous cacher des petits coins de paysage. Allez, allez, tirez! Cela ne va pas nous empêcher de voler au-dessus de vos régiments, de vos batteries, des villes en ruines que vous occupez dans l'infortunée Belgique. Cela ne nous empêchera pas de remplir notre mission.

Justement, voici un panache de fumée blanche. Je l'entrevois à peine sur ce ruban brunâtre qui se déroule parmi la campagne grise et qui est la ligne de Gand. Vite, ma jumelle. Oui, je vois un train qui s'avance vers Dixmude. Du moins, je le devine, grâce à la direction de la fumée, car, à cette hauteur, on ne perçoit aucun mouvement. C'est bien un transport de troupes. Je distingue, au milieu des wagons, les plates-formes rectangulaires des trucs. Je saisis ma carte fixée à une planchette accrochée à mon cou. Je repère le point où se trouve le train en ce moment et y mets un petit trait au crayon bleu; j'inscris l'heure à côté: 8 h. 15, et je compte le nombre des voitures.
- Une, deux, trois...

N..., les yeux au loin, comme un capitaine sur son navire, garde soigneusement sa direction. Je m'en veux maintenant de ma stupide et fugitive émotion de tout à l'heure. Je ne veux plus songer qu'à remplir religieusement ma mission. En avant! Je me sens rempli d'allégresse. Je voudrais embrasser mon pilote, tant je me sens heureux et tant je voudrais lui prouver ma confiance.

Maintenant, vous pouvez tirer, Messieurs les canonniers allemands!

de la revue 'Le Noël' no. 1080, 2 mars 1916
'Reconnaissance Aérienne'
par Marcel Dupont
du livre 'En Campagne'

En route vers le Front des Flandres, fin 1914...

Au petit jour, nous nous réveillons courbaturés et affamés , le train stationne devant une gare,encore éclairée, est-ce enfin Dunkerque, non, ce n'est que Hazebrouck nous y restons une heure environ; enfin l'on repart en rebroussant chemin et l'on arrive par un joli soleil en gare de Dunkerque. L'odeur et le murmure de la mer nous sont doux et plus encore le chocolat et le petit pain que nous prenons au buffet, heureusement ouvert.Depuis la veille à midi, nous n'avons eu comme aliment chaud qu'un café — d'ailleurs excellent — pris à une station halte-repas. Bah! c'est la guerre et nous en verrons bien d'autres.

Pour le moment, la gare de Dunkerque présente une animation pittoresque et presque joyeuse. Les officiers anglais rouges, minces, propres, allongent de grands pas sonnants de sportsmen; ils mangent, il lisent des journaux, ils parlent avec hésitation un vague français; des intendants, des interprètes vont et viennent. Calmes, accoutumés déjà à venir chaque matin déjeuner à la même table. L'on commence à sourire — lorsque soudain un train arrive, plein de choses blanches; à travers les baies des wagons-couloirs on aperçoit des oreillers blancs, des dames blanches des chemises et des linges blancs — mais sur les coffres des voitures de grandes croix-rouges et à l'intérieur — en regardant bien, on distingue des visages pâles, émaciés, des yeux clos, des yeux inquiets, des yeux fiévreux. C'est un train sanitaire?— un autre vide remonte vers le front — nous demandons à le prendre — mais nous n'en n'avons pas le droit et il faut attendre jusqu'à midi en gare de D.... (Dunkerque)

J'en profite pour aller voir mon ordonnance et mes chevaux; je trouve celui-là en train d'acheter une bouteille de vin au prix de 2 francs; je me fâche et la lui fait donner pour 1 franc; c'est déjà bien — nous ne sommes plus en Algérie! Pourtant entre les maisons blanches, la mer miroite, mais ce n'est plus la mer bleue; c'est la mer d'argent qu'opalise un rayon de soleil. Je caresse mes chevaux, dont les sabots font résonner le plancher du wagon, dont les yeux exorbités et injectés de sang trahissent la fatigue el l'inquiétude. Ils sont pourtant mieux ici que sur le bateau, mais ils n'aiment ni l'un ni l'autre. L'un, Chazeuil, est un barbe gris, solide, assez svelte, quej'ai depuis six mois, l'autre que j'ai choisi depuis la mobilisation est un alezan doré qui a du sang; sa croupe haute, ses allures allongées en témoignent; il a un nom anglais, il s'appelle Donald. J'ai été content de mettre la main sur lui; il est plus propre que les barbes gris à la guerre continentale, mais hélas! il ne la fera pas longtemps!

Le wagon de nos chevaux est attaché en queue du train, qui doit nous emmener. Nous partons enfin, il est midi — il fait un joyeux et doux soleil d'automne et, dans les rues de la petite ville, on aperçoit des toilettes claires et des vestons neufs. C'est dimanche. Nous atteignons en quelques minutes la station-frontière; le train français s'arrête ici; un train belge viendra nous prendre dans quelques temps; une heure ou deux, plus peut-être — pour nous conduire à Furnes.
Le train qui nous a amenés est reparti. La petite station est devenue calme, déserte, silencieuse et propre, comme il convient à une petite station le dimanche et dans ce calme dominical, l'oreille attend les cloches de vêpres. Mais les cloches ne sonnent pas; et c'est un autre son,qui tombe — tout à coup — dans le grand silence dominical....

Pa-poum! c'est pareil au choc mat et double d'un énorme fléau s'abattant sur des gerbes à intervalles réguliers; c'est ce qu'on entendait auprès des polygones; ce n'est pas le grondement de la bataille, c'est le bombardement méthodique, implacable.
— Pa-poum! nous écoutons...

Quelqu'un nous dit: « Ils bombardent Furnes; votre train va arriver, mais on ne sait pas si on pourra le réexpédier; ils bombardent le quartier de la gare ». Ces Messieurs nous font bien de l'honneur.

Nous errons dans la petite station, traînant nos sabres. Nous nous arrêtons devant les portes closes; nous regardons à travers les vitres. Dans une petite salle carrée, nous apercevons deux soldats couchés sur le dos, côte à côte. Ce sont deux fantassins imberbes en culotte rouge et en capote bleue, allongés sur la dalle, immobiles, les yeux clos. Leur peau trop blanche se plisse sur les os de leurs mains. Ils sont morts. Pourtant ils ne portent aucune blessure apparente et leurs visages sont apaisés...

Nous regardons, le front à la vitre, puis nous nous éloignons, silencieux.

Et voici que sur la voie du chemin de fer, du coté de Furnes, nous apercevons des gens qui viennent, des femmes surtout et des enfants dans leurs habits du dimanche, piétinant le sable et butant sur les traverses, quel étrange lieu de promenade! mais il y en a aussi sur la roule là-bas. Ils ne se promènent pas, ils fuient. Ils fuient le fléau qui s'abat sur leur ville là-bas! Ils crient, ils s'interpellent; les cheveux blonds des femmes s'écroulent sur leurs nuques, elles les retiennent d'une main, tandis que de l'autre elles tirent un enfant qui se plaint; les vieilles ont de grands châles sur la tête et sur les épaules; une petite brune, à la bouche rouge, descendante de quelque soldat espagnol, s'abrite sous une ombrelle crème. Elle nous jette au passage un regard ou il y a plus de coquetterie que d'angoisse. Soyez satisfaite jeune fille ou jeune femme, nous nous souviendrons de vous, pour votre ombrelle claire parmi ce peuple en fuite, pour votre sourire rouge parmi ces visages pâles et pour autre chose dont vous ne vous doutiez pas: le mirage soudain des luttes passées, du flux et du reflux, qui incessamment déferle sur cette grève ouverte à tous les flots et à toutes les tempêtes. Toutes cependant n'ont pas le calme de notre sœur latine: des yeux clairs regardent sans voir, envahis par une eau morte, yeux comme on n'en voit qu'à la guerre, pauvres yeux qui ont peur...

Enfin notre train est arrivé, il repart. Le soleil descend du côté de la France, et le cortège des fugitifs s'éloigne aussi de ce coté; le canon d'ailleurs se tait, comme ces vents d'été qui s'apaisent au crépuscule. Et nous entrons en gare.

Elle est intacte et en pleine activité; les cours sont remplis de fourgons venus au ravitaillement; je cherche vainement un quai ou une rampe pour débarquer mes chevaux; il me faudra attendre la pleine nuit. Je vais prendre les ordres et préparer mon logement. La ville est animée, tout le monde n'est pas parti, on commente vivement le coup de canon qui a fait un trou hexagonal dans la façade de l'hôtel, où déjeunait l'état-major belge; c'est le seul dégât que j'aperçoive. Les maisons de la petite place forment le carré autour de l'hôtel de ville aux colonnes légères, sur la porte duquel flotte un énorme drapeau; les façades triangulaires et ciselées sont alignées comme pour une parade. Les estaminets sont pleins de soldats et de civils. Mes chevaux sont logés dans une remise derrière l'un de ces estaminets; pour y pénétrer, ils doivent traverser un corridor; les braves bêtes entrent là sans trop rechigner, guidées par une belle fille blonde dont les sabots font cloc, cloc, à chaque pas.

Pour regagner mon logement, il faut franchir un petit canal; je m'arrête un instant sur le pont, je m'accoude au parapet de pierre; derrière moi des fourgons passent en sautant sur les pavés; mais l'eau est immobile et, tout le long d'elle, les quais sont silencieux et sombres. La lune monte et reflète sa face ronde et pâle sur l'eau calme du canal. Les chariots ont passé; la petite ville s'endort — sous la lune — résignée à ce qui doit arriver...

Vital MAGNE, 1918

le général Foch à Cassel en 1914

La Pendule de Cassel

Il est déjà tard dans la nuit.
Cassel, petite ville flamande dont l'antique splendeur n'abrite plus que des crépuscules d'existences bourgeoises, a depuis longtemps clos ses volets. Sur la place, les autos du groupe d'armées se cachent dans l'ombre de la haute rampe princière que décore en son milieu une fontaine Louis XIV. Un chasseur à pied, baïonnette au canon, et un gendarme, dont le visage disparaît dans le col relevé de son manteau, battent la semelle sur le trottoir, au pied du fanion cravaté de rouge et de blanc, fanion improvisé au début de la guerre, dans le désarroi de la tourmente, avec une lance empruntée au théâtre de Reims, une de celles qui servaient indistinctement pour le défilé à'Aida, le chœur de Faust ou le dernier acte de Carmen. Par le courant d'air qui s'engouffre sous la voûte de la porte de Bergues arrive le grondement lointain mais ininterrompu du canon qui « tape dur » du côté d'Ypres.

Là-haut, au premier étage de la mairie, les fenêtres sont éclairées. Il y a celle, étroite, du Central téléphonique, puis les baies glauques du hall dont une lampe fumeuse assume à elle seule la clarté et où, frileusement, les estafettes jouent aux dominos autour du poêle, puis les deux fenêtres du chef d'état-major et du bureau des opérations et enfin les fenêtres du général Foch.
Dans le couloir sombre qui mène à ce bureau, sur la porte duquel on lit « Caisse d'épargne », Gifosse, le planton du général, se rafdit, hiératique et vigilant, sur sa chaise. Un filet de lumière filtre sous la porte qui mène au réduit poussiéreux où, faute de mieux, on a logé les officiers du chiffre. Derrière une cloison, le son galopant d'une machine à écrire trouble seul le silence.

Ce sont pourtant les heures dramatiques de la bataille de l'Yser: octobre et novembre 1914. On se serait imaginé une fièvre intense, un perpétuel va-et-vient d'officiers d'état- major crottés, des ordres nerveux, des portes qui claquent, une vision napoléonienne d'activité fébrile. Non, c'est le silence, un silence très calme, respectueux et confiant. Le général et son chef d'état-major travaillent. Eux seuls connaissent l'étendue et les difficultés du problème. Tout est absorbé par ces deux cerveaux. Le travail d'analyse et de synthèse se développe en eux. Ils n'en laissent rien deviner. Pas de confidences, de conférence générale où chacun dit son mot, où l'on s'énerve mutuellement à discuter des hypothèses et proposer des solutions.

La pensée du chef domine, parce qu'elle doit dominer, parce que c'est le principe même du haut commandement. Celui-là est fort qui accepte toutes les responsabilités, non seulement vis-à-vis des autres, mais vis-à-vis de lui-même et ne cherche pas à se couvrir devant sa propre conscience par l'avis plus ou moins autorisé d'un tiers.

Le général Foch a ce courage et cette foi. Parfois, dans le courant de ces journées, il traverse la place, monte vers la vieille église dont un crucifix géant, entouré de lierre grimpant, décore la façade, et pénètre dans le sanctuaire vide. L'homme de guerre va prier. Oh! ce n'est pas un vain exercice de paroles, la répétition de certaines formules sacrées, une invocation magique, un appel théâtral à quelque vieux Dieu français, — c'est son âme angoissée qui entre en rapport conscient avec la puissance mystérieuse dont elle sent qu'elle dépend et que dépendent sa destinée et celles de millions d'êtres qui gravitent autour d'elle. C'est un acte de soumission et de foi. C'est la dépendance puis la liberté que donne l'accord avec son Dieu.

En ces instants si graves de la vie de notre pays, quand la plus petite erreur dans les jugements et les décisions peut être fatale, l'homme sur lequel pèse l'une des plus formidables responsabilités que l'on puisse imaginer, humblement puise sa force dans la prière. La force qui incline est aussi celle qui redresse.

Au silence et à l'ombre du temple succèdent le silence et la clarté du cabinet de travail.
Les cartes couvrent les grands panneaux de chêne des murs.

Sur la cheminée, deux chandeliers, une vieille sonnette de bronze noirci et une délicate pendule Louis XVI dont deux colonnettes blanches supportent le cadran.
Cette pendule au balancier visible sera l'unique compagne des veillées émouvantes. Son maître, le Temps, est un collaborateur avec lequel la stratégie doit compter. « Le débarquement des renforts a-t-il pu se terminer assez vite pour secourir le point de la ligne qui faiblit? La 42e division a-t-elle réussi à reprendre Ramscapelle? Comme les heures passent lentement! Comme les heures vont vite! Le 9e corps n'a pas encore téléphoné? » La petite pendule poursuit le va-et-vient de son balancier. Au temps lointain où l'horloger la créa, elle ornait quelque boudoir, celui de Mme la Conseillère ou d'une noble dame du comté des Flandres. Elle a marqué bien des heures frivoles et inutiles, puis sont venus les jours graves de la Révolution, — peut-être en ces jours-là ne l'a-t-on plus remontée? Des kaiserliks, quelque soir de patrouille, l'ont convoitée, mais les hussards du général Vandamme ont empêché son départ au delà du Rhin. C'est l'épopée napoléonienne, puis le calme de la vie bourgeoise française qui revient; 48; le Second Empire; la tragédie de 70; le grand effort de relèvement de notre Patrie, sa résurrection. Le petit disque de cuivre se meut de droite à gauche et de gauche à droite, tic, tac... tic, tac, discrètement, comme font les bonnes pendules françaises qui répugnent au bruit fatigant des coucous de la Forêt Noire.

Dixmude, Bixsehoote, Poesele, l'écluse de Nieuport, Neuve-Chapelle... L'histoire s'écrit lentement, les jours s'effeuillent, la destinée s'accomplit. La pendule, à laquelle les pulsations de cuivre donnent comme une vie intérieure, a été pour le général une amie, une confidente. Elle sait un peu des pensées qui ont bouillonné dans ce cerveau génial et qui en sont sorties clarifiées, calmées, prêtes à se muer en actes virils et bienfaisants.
Un jour de printemps, des plantons sont venus décrocher les cartes du mur; le général est parti, la mairie a repris son existence normale et le couloir de la Caisse d'épargne a vu se réunir les souscripteurs de l'Emprunt.

La bataille s'était déplacée vers le Sud. Cassel redevenait petite ville de province. On commençait déjà de dire, dans les conversations: « Vous souvenez-vous, quand le général Foch était là... »

Les années ont passé, puis, un soir, la plaine des Flandres s'est sentie à nouveau secouée d'un terrible frisson. La ruée allemande recommençait. Elle déferlait au sommet du Kemmel, elle s'épandait dans les villages dévastés, elle menaçait Cassel. Ce fut une grande angoisse.
Mais le général Foch est revenu; il a repris, pour quelques jours, le petit bureau du receveur de la Caisse d'épargne; il s'y est enfermé avec ses cartes et son téléphone, et, machinalement, dans ce cadre familier, ses yeux se sont portés vers la pendule Louis XVI aux colonnettes de marbre.

Et le passé est réapparu. Aux jours déjà lointains de 1914, l'armée française, presque seule, avait, dans un admirable effort, brisé l'assaut germain. Nous n'avions plus de réserves, peu d'artillerie lourde, peu de munitions; l'armée anglaise n'était qu'une petite phalange ; l'armée belge manquait de tout. En frères d'armes, en braves gens, on s'était entr'aidé. Comme tout cela est loin et proche à la fois ! Maintenant, du monde entier, les secours sont venus à la France, de formidables armées se rallient à nos étendards, les usines de la moitié du globe travaillent pour les soldats de l'Entente. Qui eût cru qu'un jour, de ce même petit bureau de Cassel, partiraient des ordres d'attaque pour des divisions américaines!

La vieille pendule vient de sonner la demie de l'heure. C'est comme une réponse aux pensées qui vont vers elle.
Et elle dit: « Quel étrange souvenir s'éveille en moi! J'entends maintenant d'anciennes, très anciennes causeries. C'était tout au début de mon entrée dans le monde. Au coin de la grande cheminée, dont je décorais le centre, un jeune officier était accoudé et il parlait avec un vieux gentilhbmme à perruque poudrée. Je me souviens qu'ils avaient longuement discuté de M. de Voltaire, dont le retour à Paris avait fait tant de bruit, et puis le jeune officier s'était animé. Il disait son enthousiasme pour un pays d'outre-mer qui luttait pour son indépendance; il s'enflammait au mot de « liberté », le plus beau mot de la langue française; il affirmait qu'un Français se devait de soutenir une telle cause et qu'il allait partir. Quelqu'un survint et l'appela. J'ai su ainsi qu'il se nommait M. le marquis de La Fayette. »

La petite pendule a dit tout cela de sa jolie voix d'ancienne France, comme sur deux notes hautes d'un lointain clavecin. Tic, tac... Tic, tac... Les aiguilles avancent sur le cadran d'émail. Un jour encore va bientôt finir.

De lourds tracteurs, qui roulent sur la place, font trembler les vitres; des régiments défilent en martelant les pavés; c'est une immense armée qui marche à la rencontre des barbares.

Des jours et encore des jours passeront. Un soir le canon se taira et on ne l'entendra plus jamais. Le receveur de la Caisse d'épargne ne reviendra pas, chose curieuse, dans son bureau. Un employé de la mairie, en bel uniforme neuf, ouvrira la porte devant des touristes, qui s'arrêteront sur le seuil, n'osant pas le franchir, comme à l'entrée d'un sanctuaire. Il leur dira simplement: « Le bureau du général Foch. »

Ils écarquilleront les yeux et, dans cette pièce nue, dédaignant les deux modestes chandeliers et la lourde sonnette, ils fixeront leur attention sur une délicate pendule Louis XVI, bien à l'abri sous un globe, sans réaliser peut-être tout à fait que son vieux mécanisme, ciselé par un bon ouvrier français du dix-huitième siècle, a pu assez durer, comme tout ce que la France a créé de robuste et de beau, pour marquer les heures les plus grandes de l'humanité.

René Puaux

de la revue L'Illustration No. 3924, 18 mai 1918

vendredi 28 avril 2006

Bruges-la-Morte

Bruges, Bruges-la-morte, est une ville qui n'a offert que peu de prise au temps. Ici seuls quelques rares détails, à peine perceptibles trahissent le temps qui passe. L'Hôpital Saint-Jean, vénérable institution n'a que peu changé, la ville s'est endormie, ne s'est pas attiré les foudres des hordes ennemies et est devenue le plus bel écrin pour l'art des Flandres et terres du Nord...

Bientôt l'été reviendra et l'on pourra retourner se baigner en toute quiétude...

A vos tablettes : Colloque sur Quentovic

Les 11, 12 et 13 mai prochain se tiendra un important colloque sur Quentovic, cet important port caroligien totalement disparu et constituera un des points forts de cette fin d'année universitaire...
A voir donc...

tous renseignements utiles sur le site de l'Université du Littoral : http://www.univ-littoral.fr/actu/mani/mani_scie.htm

Au travers de la frontière qui n'existe pas... ou si peu

Des bonnes volontés, il n'en manque pas pour effacer cette frontière dressée au milieu des Flandres par la force des traités plusieurs fois séculaires:

Le KFV, Comité pour la Flandre française, a été fondé en 1947 par André Demedts et Luc Verbeke. C'est une association privée, constituée de volontaires, qui, depuis plus d'un demi-siècle déploie tout un éventail d'activités de terrain très concrètes au profit de la Flandre française. Depuis quarante-huit ans, le KFV s'intéresse tout particulièrement à l'enseignement du néerlandais par le biais de plus de trente cours gratuits, organisés dans diverses localités.


Komitee voor Frans-Vlaanderen v.z.w.Comité pour la Flandre française a.s.b.l.
zetel/siège: B-8790 Waregem
secretariaat/secrétariat KFV vzw - redactie/rédaction KFV-Mededelingen:p/a: Dirk Verbeke Kerelsstraat 17 - B-8800 Roeselare
telefoon/téléphone: [0032](0)51 205508 - fax/télécopie: [0032](0)51 205508
e-post/courriel:
kfv.fransvlaanderen@skynet.be

ou sur le site http://www.kfv-fransvlaanderen.org/

sur la page http://www.kfv-fransvlaanderen.org/pages/www.htm, vous trouverez les adresses des associations qui oeuvrent dans le même sens...

jeudi 27 avril 2006

La nymphe de pierre se moque du soir qui tombe... Elle ne peut qu'apprécier le temps qui passe et sans lui opposer la moindre résistance, constate que le temps fuit toujours. Figée pour l'éternité dans une pause suppliante, elle est attendrissante en ce moment vespéral où la nature qui l'entoure change entre chiens et loups et où le moindre bruit devient inquiétant... On l'aurait aimé alanguie, elle devient orante.

Rien de tel que la fraîcheur d'une allée de sous-bois quand dardent les premiers véritables rais du soleil printanier, l'on s'y cache, regardant d'un oeil distrait les premières fleurs qui percent et se balancent au grè du vent, que l'herbe reverdit entre les troncs et que le bruit des semailles s'atténue au loin, étouffé par le vent dans les frondaisons. Bientôt les futaies bruisseront du cri des oiseaux, l'été reviendra et peut-être écrasera tout cela sous la chaleur, forçant le promeneur à s'arrêter et se laisser envahir par la torpeur.

ruines

Passés les combats, il faut s'accorder sur la volonté de faire renaître lma région, ravagée à l'image des quais de Dunkerque...

Au seuil de la Neuve-Eglise

«Heerlykheid van Nieuwkerke
Dus zag men in 1608 den grond tot het nieuwe Stadhuis en de Halle leggen, en den Toren uit de aarde opryzen; de drie Kooren der Kerspel-kerk, met kruiswerken aan de zyden, herstellen; de Weevery van lichte wolle stoffen, gemeenelyk Bayen genaamt, hervatten , en met kracht voortzetten, mits deze Koopmanschappen by de Vreemdelingen zeer geacht waren.» (Sanderus, Flandria Illustrata, édition de 1735)

«Seigneurie de Nieuwkerke (Neuve-Eglise)
L’on assista donc en 1608 à la fondation du nouvel Hôtel de Ville et de la Halle et à l’érection de la Tour, à l’édification de l’Eglise paroissiale à trois chœurs avec absides sur les côtés. Le tissage d’étoffes légères de laine, communément appelées Baies a repris et se perpétue avec vigueur, dans la mesure où ces marchandises étaient très estimées des Etrangers.»

Dans la capitale...

«De Deulle vloeit zachtjes in de Grachten der Stad, dringt vervolgens door de Muuren, en bespoelt door haare Bochten de meeste Plaatzen (...) het Water, het welk uit de nabuurige Bronnen in de Voorstad opwelt, ontfangen, en vervolgens door loode en aarde Buizen verdeelt word. De groote Pypen loopen recht toe naar de opentlyke Plaatzen der Stad, waaruit vervolgens eenige Fonteinen zachtjes opborrelen. De grootste van deze voorziet de Markt altoos van versch Water, en de kleinder Pypen brengen het Water van daar naar de byzondere Huizen.
De Muuren zyn groot in den Omtrek, sterk, en fraai, men kanze naauwelyks binnen een uur rond gaan (...). De Muuren, Poorten, en Bolwerken, bestaan van onderen uit harde vierkante steenen, en van boven uit roode gebakken steen, van welke stoffen de Haven insgelyks gemaakt is.
Van binnen word de Stad versiert met schoonen Straaten, Huizen en gebouwen, en eene groote meenigte van Menschen. De voornaamste Straaten zyn zeer breed,(...)
Ryssel pronkt ook behalven de Kerk van S. Peter, dewelke een heerlyk Gebouw is, met vyf Kerspel-kerken, die aan S. Peter, S. Steven, S. Mauritz, den H. Zaligmaker, en S. Kattryn toegewyd, en met veele kunstige Schilderyen, geschilderde Glaze Vensters, en andere uitmuntende Kerksieraden opgeschikt zyn.
Men Ontmoet ‘er insgelyks verfcheide Mannen-Kloosters, namelyk die van de Preekheeren, van de Franciskaner-en Kapucyner-Monniken, van de Priesters de Maatschappye van Jesus, en van de Augustyner-en ongeschoeide Karmelyter-Monniken, alsmede de volgende vrouwen-Kloosters, te weten, van de Klarissen, de Brigittyner-Nonnen, de Penitenten, en Grauwe en zwarte Zusters. Behalven deze zyn ‘er nog drie groote Godshuizen, waarin de zieken door Nonnen van den Regel van S. Augustyn opgepast worden.(...)
Onder de andere Gebouwen spant het Paleis des Konings, de kroon. Het is gebouwt door Philips den Goeden, Hertog van Bourgonje, en Graaf van Vlaandre, die het, na dat het voltooit was, een prachtig Gastmaal inwydde, en daar op Verscheide Ridders van het Gulde Vlies maakte. Het Stadhuis ziet met een dubbelen Gevel op de Markt. (...) De Reken-Kamer, gelyk menze noemt, strekt de Stad mede tot eenig versiersel. (...)
Ryssel heeft, voor het overige, zo veele Voorsteeden als Poorten, te weten zeven in getal, die fraai, lang, wyd uitgestrekt, en vol Volk zyn, en meest na steden gelyken. Men ziet’er veele Tuinen met Boomen beplant, met allerhande Bloemen versiert, en van gaanderyen voorzien,(...)
De Namen der Poorten zyn deze; namelyk, de Fivie-Poort, de Zieken-Poort, O. L. Vrouwe-Poort, de Bare-Poort, S. Peters-Poort; S. Magdelena-Poort, en S. Mauritz-Poort. (...) In die aan de Zuidzyde verscheide Wind-Moolens opgerecht, waarin allerlei Graanen, Basten van Boomen, Raap-en Lynzaad, en diergelyke goederen gemaalen worden; (...)
In de Voorstad van S. Peter, waardoor men naar Vlaandre gaat, ziet men eene besloote Plaats dewelke in verscheide Huizen waarin Begynen woonen, verdeelt is. (...)
Lodewyk de XIV, Koning van Vrankryk kwam haar in 1667 geduurende de minderjaarigheyt van Karel den II koning van Spanje, en in vollen Vreede, zelfs belegeren (...).
Zederd dien tyd, is deze Stad merkelyk vergroot door de nieuwe Stad, en door den Heer van Vauban met een Slot versterkt.» (Sanderus, Flandria Illustrata, édition de 1735)


La Deûle coule doucement dans les fossés de la Cité, se presse le long des remparts et se glisse en méandres dans la plupart des endroits. L’eau reçue qui jaillit des sources proches dans la banlieue, est répartie par des conduites de plomb et de terre.
Les grandes conduites courent à travers les espaces ouverts de la cité, dans laquelle elles jaillissent doucement de quelques fontaines. La plus grande de ces dernières pourvoit le marché en eau fraîche, et de plus petits tuyaux en apportent l’eau vers les maisons particulières.
Les murs ont un grand pourtour, sont forts et beaux; on peut à peine en faire le tour en une heure (...). Les Murs, portes et bastions ont leur soubassement en dures pierres carrées et leur partie supérieure en briques rouges desquelles le port est également constitué.
L’intérieur de la ville s’orne de belles rues, maisons et bâtiments et compte un grand nombre de personnes. Les rues principales sont très larges.
Lille fait aussi étalage, outre de l’église Saint-Pierre, laquelle est un bâtiment dédié au Seigneur, de 5 églises paroissiales, qui sont dédiées à St-Pierre, St-Etienne, St-Maurice, St-Sauveur et Ste-Catherine et parées de nombreuses peintures d’art, de vitraux peints et d’autres brillants ornements d’église
L’on y rencontre également différents monastères d’hommes, principalement ceux des Prêcheurs, des moines Franciscains et Capucins, des prêtres de la Compagnie de Jésus et des moines Augustins et des Carmes Déchaussés, et également les couvents des femmes suivants, à savoir les Clarisses, les Brigittines, les Pénitentes et les Sœurs Grises et Noires.
Outre ceux-ci, il y a encore trois grandes maisons de charité où les nonnes de la Règle de St-Augustin prennent soin des malades.
Parmi les autres monuments se dresse le Palais du Roi, la Couronne. Il a été construit par Philippe le Bon, Duc de Bourgogne et Comte de Flandre qui, après son achèvement, y tint un magnifique banquet et y fit plusieurs Chevaliers de la Toison d’Or. Sur le marché l’on voit l’Hôtel de ville avec un double pignon. La Chambre des Comptes, ainsi dénommée, pare la ville de quelque ornement.
Au reste, Lille a autant de faubourgs que de Portes, à savoir sept, qui sont beaux, grands, largement étendus, pleins de monde et ressemblent pour la plupart à des villes. On y voit beaucoup de Jardins et d’arboretums, décorés de fleurs de toutes sortes et pourvus de galeries.
(...)
Les appellations des Portes sont celles-ci: Porte de Fives, Porte des Malades, Porte Notre-Dame, Porte de la Barre, Porte St-Pierre, Porte Ste-Madeleine et Porte St-Maurice.
Au sud de la ville se dressent différents moulins qui font mouture de toutes sortes de grains, écorces d’arbres, grains de navets et de lin et matières animales.
Dans le faubourg St-Pierre, celui par lequel on se dirige vers la Flandre, on voit un espace clos qui est partagé en différentes maisons où habitent des Béguines.
Louis XIV, roi de France, en 1667, pendant la minorité de Charles II roi d’Espagne et en pleine paix, vint l’investir.
(...)
Depuis ce temps, cette cité s’est remarquablement agrandie de par la nouvelle ville et a été fortifiée par Vauban avec une citadelle.

Avant le martyre de la mêlée des Flandres

BESCHRYVING DER STAD KOMINES
"Tusschen Waaste en Werwyk (...) is gelegen de fraaie, doch vans Muuren ontbloote Stad Komines. (...)
Men ziet 'er een fraaie Kerk welke aan S. Peter toegewyd is, en door Kanonniken bedient word, nevens twee Nonne-Kloosters, te weten die van de zoogenaamde Grauwe-Zusters, en van de Franciskaner-Nonnen."

(Sanderus, Flandria Illustrata, édition de 1735)

DESCRIPTION DE LA VILLE DE COMINES
Entre Warneton et Wervicq, est située la belle, et pourtant dépourvue de murailles, ville de Comines. (...) On y voit une belle église, consacrée à St-Pierre, et desservie par des moines, à côté de deux couvents de nonnes à savoir celles qui sont appelées Sœurs Grises et Nonnes Franciscaines.

au coeur des marais de Flandre

BESCHRYVING VAN HET VLEK HAZEBROEK.
Hazebroek is een fraai en Volkryk Vlek in West-Vlaandre. (...)
Het is in een moerassigen Oord gelegen, en voormals door zyne Linnen-en Laken- Weeveryen zeer vermaard geweeft, zynde tot gemak van den handel eenige Vaarten door het Niepe Bosch tot in de Lye gegraven.
Behalven de Voorrechten der Steden, welke dit Vlek (...), geniet, heeft het een Gerechts-Hof van zeven Schepenen, eene byzondere Wet, en eene eige Maat, en Koophandel.
Hier by komen de Gilden der Boogschutters, Rederykers, en Ambachten, onder welke de Ingezetenen verdeelt zyn, en dus zoude men dit Vlek onder de voornaamste moogen stellen, indien het door de Burgerlyke Oorlogen niet zo veel geleden hadde.

(Sanderus, Flandria Illustrata, édition de 1735)

DESCRIPTION DU BOURG DE HAZEBROUCK
Hazebrouck est un beau et populeux bourg de Flandre occidentale.
Elle est placée dans un site marécageux et a été autrefois très réputée pour ses tissages de lin et de draps, son commerce étant facilité par quelques canaux creusés à travers le Bois de Nieppe jusqu'à la Lys.
Mis à part les privilèges urbains dont jouit le bourg, elle a une cour de justice de sept échevins, une loi particulière, sa propre mesure et du commerce.
Viennent ici les guildes des archers, des rhétoriciens, et des métiers entre lesquelles les habitants se partagent, et l'on pourrait donc compter ce bourg au nombre des plus importants s'il n'avait tant eu à souffrir des guerres civiles.

la ville de Saint-Winoc

" DE BESCHRYVING DER STAD EN KASSELRYE VAN WINOXBERGE
Na het gevoelen van Malebranche en Scriekius heeft Winoxberge haaren Naam ontfangen van den Burg, Welke gemeenlyk groenberge genaamt, een voormals in de Voorstad gelegen was, doch zedert hondert, en vyftig Jaaren herwaards binen den omtrek der Stads-Muuren geslooten is.
Op dezen Burg heeft Boudewyn, bygenaamd Schoonbaard, Graaf van Vlaandre, de Abdye der Benedictyner Monniken, welke eerst te Wormholt, en vervolgens op S. Maartens-Bergopgerecht was, doch eindelyk na deze stad overgebragt wierd, geplaatst, en dezelve aan den Heyligen Winokus, een Man uit Adelyken Huize in Bretanje gresproten, en van een zeer heilig Leven, toegewyd.
Die Abdye is van ryke inkomsten voorzien, en bezit verscheide heerlykheden, en de Kloostervoogd van dezelve bekleed de tweede Plaats onder de Abten van Vlaandre."

(Sanderus, Flandria Illustrata, édition de 1735)

DESCRIPTION DE LA VILLE ET CHATELLENIE DE BERGUES SAINT-WINOC
Selon Malebranque et Scriekius, Bergues Saint-Winoc a reçu son nom du bourg fortifié appelé Mont-Vert et autrefois situé dans le faubourg, et cependant intégré à l'intérieur de l'enceinte de la cité depuis 150 ans.
Sur ce bourg, le Comte de Flandre Baudouin dit la Belle-Barbe, a implanté l'abbaye bénédictine qui dans un premier temps fut à Wormhout, ensuite sur le Mont Saint-Martin et finalement auprès de cette cité elle-même consacrée à St-Winoc, un homme issu de la noblesse de Bretagne et dont la vie fut très sainte.
Cette abbaye est dotée de riches revenus, possède plusieurs seigneuries et son père abbé occupe la deuxième place parmi ceux de Flandre.

à l'embouchure de la Deûle

Deullemond
Tegen over de Plaats daar de Deulle zich in de Leie uitstort en met haare Wateren haaren Naam verliest, ontmoet men Deullemond, dus van de gemelde Rivier, die hier, om dus te spreeken, haaren Mond opent, en haar water in de Leie laat uitloopen, genaamt, (...)
Het Kasteel van den Eignenaar van deze Plaats is zeer fraai van gebouw, en strekt dus aan het Dorp tot sieraad." (Sanderus, Flandria Illustrata, édition de 1735)

DEULEMONT
A l’endroit où la Deûle se jette dans la Lys, et où avec ses eaux elle laisse son nom, on rencontre Deûlement, qui tire son nom de la rivière mentionnée qui ici, pour ainsi dire, ouvre sa bouche et laisse ses eaux couler dans la Lys.
Le château du propriétaire de cette place est très beau de construction et se pose donc en ornement du village."

lundi 24 avril 2006

Jean, Sébastien et les autres

Samedi 29 et dimanche 30 avril, rendez-vous vous est donné pour la Journée eurorégionale des villes fortifiées, troisième édition. Dépassant même le cadre des frontières du Nord et du Pas-de-Calais, de nombreuses animations et visites vous seront proposées. La vision de la région se fera pour vous sous un nouvel angle: celui de la conquête par le Royaume de France, avant Louis SIV avec Jean Errard, dit Errard de Bar-le-Duc et avec le Roi Soleil avec Sébastien le Prestre... Allons, vous le connaissez, c'est le fameux Vauban...

Tous les renseignements dans les offices de tourisme et syndicats d'initiative des villes concernées et sur le site de l'association pour la mise en valeur des espaces fortifiés de la région Nord-Pas-de-Calais à l'adresse suivante: http://www.espacesfortifies.com

A bientôt dans les pas de nos poliorcètes...

dimanche 23 avril 2006

In memoriam : Jean Becaert

Dunkerque a perdu hier samedi 22 avril l'un de ses plus fidèles défenseurs. Le commandant Jean Becaert n'est plus... Né le 2 août 1917, Jean Becaert s'engagea dans l'armée en 1937 par devancement d'appel. Incorporé au 110e Régiment d'Infanterie, il combattit en Belgique en 1940 puis embarqua pour l'Angleterre lors de l'opération Dynamo dont il était devenu le symbole dans l'agglomération. Revenu en France, il fut fait prisonnier mais s'évada d'Allemagne pour regagner Dunkerque, devint officier dans le Réseau "Voix du Nord".

Fidèle à ses engagements des années de guerre, il continua de militer après: membre du conseil municipal de Malo-les-Bains jusqu'en 1971, il fut une des chevilles ouvrières de la Reconstruction de la cité-martyre. Militant dans de nombreuses associations, il fut élu président du syndicat d'initiative de Malo et fut également l'un des membres fondateurs de l'association philanthropique des Chevaliers du XXe siècle.

Les obsèques seront célébrées mercredi 26 avril à 14 h 30 en l'église Notre-Dame du Sacré Coeur à Malo-les-Bains (Dunkerque)

Attendez-vous à apprendre que...

Noordpeene
Pour découvrir l’histoire de la Flandre, un parcours existe.


Les circuits de la bataille
Avec le retour des beaux jours, Noordpeene offre une balade instructive aux portes de la commune. Les circuits Au coeur de la Bataille retracent l’histoire de la bataille de la Peene autour de la commune.
Il existe une boucle pédestre (10km) et une variante VTT (22km).
Ces tracés parcourent les endroits stratégiques du champ de la bataille de la Peene où s’affrontèrent en avril1677 les troupes de Philippe d’Orléans (frère de Louis XIV) et celles de Guillaume d’Orange, Stadhouder des Provinces Unies (les actuels Pays-Bas).

Départ possible de Zuytpeene
Louis XIV voulait prendre Valenciennes, Cambrai et Saint-Omer pour assurer à jamais le repos de ses frontières. Guillaume d’Orange accourut de Hollande pour empêcher la prise de Saint-Omer par les Français…Les deux armées s’affrontèrent sur les territoires de Noordpeene et de Zuytpeene.La défaite hollandaise lors de la bataille de la Peene causa notamment l’annexion de Saint-Omer et des châtellenies de Cassel et Bailleul au royaume de France.

Un circuit d’interprétation existe également; des bornes sont installées le long du circuit pédestre.
Le départ de ces circuits peut s’effectuer indifféremment de Noordpeene ou de Zuytpeene.

Plus que neuf mois d’attente
Les fiches éditées par le conseil général sur les tracés sont disponibles dans les offices de Tourisme et les «cafés-rando». Il est aussi possible de les télécharger sur le site du comité départemental du tourisme ( http://www.cdt-nord.fr ).
Dans neuf mois sera dévoilé le complément indispensable à ces circuits: la Maison de la Bataille, centre d’interprétation de la bataille du val de la Peene, ouvrira ses portes.

In LA VOIX DU NORD, édition de Dunkerque 23 avril 2006

samedi 22 avril 2006

La nuit ne va plus tarder dans le ciel voilé du printemps naissant...

La Révolution Industrielle dans le Nord a quelque chose d'étrange. On la présente comme un phénomène urbain, ou du moins à l'origine de la dernière grande explosion urbaine alors que nombre de villages sont dominés par les cheminées et les faéades aveugles des usines comme à Coppenaxfort ou parfois même, comme dans les campagnes, elles sont isolées et sont les seuls points de repères.

Le soir tombe mais le travail ne souffre pas de pause sur les canaux du Nord.

Le temps ne semble pas avoir de prise dans certaines rues de Brouckerque.

vendredi 21 avril 2006

Pour l'honneur et l'amour de la Bourgogne

Quand Louis XIV annexa purement et simplement la Flandre, on continuait d'y exhiber fièrement la Croix de Bourgogne, la fameuse croix de Saint-André qui rappelait l'instrument de son supplice. Il est vrai que les Flamands goûtaient peu le changement de maître, qui leur couterait tant économiquement et fiscalement. Le drapeau des Espagnes cède la place au Lys de France.



De couleur rouge, elle fait partie de l’emblématique des ducs de Bourgogne depuis Jean Sans Peur (1371-1419), qui en fait le signe de ralliement de ses partisans face à la croix blanche droite que portent les hommes du comte d’Armagnac.

Son fils Philippe le Bon, en plaçant en 1429 son Ordre de la Toison d’Or sous l’invocation de saint André, fera un usage abondant de cette croix qui ne quittera plus l’emblématique des ducs de Bourgogne et de leurs successeurs : de l’embouchure du Rhin à la vallée de la Saône, les possessions ducales vont se couvrir de croix de saint André, généralement représentées sous la forme de deux bâtons écotés rouges passés en sautoir.

Lorsque Charles le Téméraire trouve la mort devant Nancy en 1477, la croix de saint André devient " le signe de ralliement de ceux qui demeurèrent fidèles à l’orpheline ", sa fille Marie de Bourgogne.

D'ailleurs, elle se situe au centre même des Armes du bataillon des Canonniers Sédentaires de Lille, à peine couverte par le Lys florencé de la Ville.


Dans l’héritage des Habsbourg, le mariage de Marie avec l’empereur Maximilien fait passer la croix dans le domaine des Habsbourg, en même temps que le comté de Bourgogne lui-même.

L’empereur hérite avec cette croix des deux signification symboliques qu’elle a acquise en tant qu’emblème d’opposition à la France d’une part et en tant que rappel de l’héritage bourguignon d’autre part. La croix de Bourgogne suivra les destinées de l’empire de Charles Quint : après son abdication en 1556, elle sera l’emblème à la fois des empereurs germaniques et des rois d’Espagne.

drapeau d'Espagne de 1506 à 1785

Il survit dans l'aviation espagnole sous forme d'une croix de saint-André noire sur la dérive

Avant 1477, la croix de Bourgogne était commune aux deux rives de la Saône : à la mort du Téméraire, Louis XI met fin à cette situation en intégrant définitivement le duché de Bourgogne à la France. Tandis que la croix de saint André flotte en Comté comme dans toutes les autres possessions des Habsbourg, celle-ci paraît disparaître du duché de Bourgogne .

Le partage des pauvres des Flandres

Les frontières de la fin du XVIII° siècle sont fixées définitivement, pour le nord de la France, à la conclusion de la Paix d’Utrecht en 1713. Sur la façade littorale flamande, une ligne fixée de part et d’autre du réseau de fortifications du Pré Carré de Vauban sépare la Flandre Maritime de la West-Flandre, aujourd’hui en Belgique. Cette séparation que nulle réalité géographique ne vient conforter n’est en rien un obstacle pour la circulation des personnes.


Une situation économique difficile en Flandre littorale

En 1762, les autorités de Flandre Maritime et de Flandre Occidentale reprennent en commun un règlement déjà conclu en 1750 pour le faire approuver par les bourgmestres et échevinages de plusieurs villes. Ce document prend en compte la mobilité des populations. Publié à Dunkerque, par Weins, l’imprimeur de la ville, le «règlement pour l’entretien des pauvres» est un accord transfrontalier édité dans les deux langues du pays, le français et le flamand. C’est dire si les difficultés sont nombreuses et transcendent la simple notion de frontière politique pour la nécessité de trouver un accord entre les deux entités politiques.

En effet, en ce XVIII° siècle finissant, l’économie flamande ne présente plus les caractères de précocité des siècles précédents. Elle est même en passe de manquer la marche de la Révolution Industrielle, pourtant si largement entamée chez ses voisins d'outre-manche, mais il est vrai que la Flandre ne possède pas de grands gisements de charbon, préalables à cette révolution, excépté les gisements de la faille du Midi, que l’on tarde à exploiter.
Mis à part quelques lieux où la production de textile perdure, la Flandre est avant tout un pays dominé par l’agriculture. Il y aurait bien les ports pour permettre un essor économique mais ceux-ci, Dunkerque en tête, connaissent de dramatiques arrêts de leurs activités lors des guerres telles la Guerre de Succession d’Autriche (de 1744 à 1748) ou encore la guerre de Sept ans (de 1756 à 1763) - et cela sans augurer de difficultés futures.

Ajoutons à ce déjà triste tableau une population «handicapée» par une forte pression démographique qui réduit considérablement la taille des lopins de terre à disposition de paysans. L’agriculture de la Flandre littorale présente encore quelques aspects vivriers, d’autant plus que la plupart des terres sont sableuses donc pauvres. Pour survivre, il est un besoin impérieux d’avoir une activité salariée complémentaire. Il y a peu de travail, pas ou peu d’épargne et la ville reste caractérisée par l’activité artisanale, fournissant peu d’emplois. Ce manque de ressources est d’autant plus criant que la pression fiscale, déjà forte de l’Ancien Régime, ne cesse de s'accroître. Il faut donc partir à la recherche de revenus ou de simples moyens de survie. Cette pauvreté augure déjà les forts courants migratoires flamands vers les régions sidérurgiques et textiles du XIX° siècle.


Une précarité préoccupante

Ce sont donc de nombreux facteurs qui convergent vers la précarisation plus forte des populations de ces deux parties de Flandre. Une précarité qui, de crise économique en crise sociale, pose de façon aiguë la question de l’aide aux populations pauvres. L’Etat-Providence reste à inventer. Pour la fin de l’Ancien Régime, il est encore une entité lointaine, sauf en cas de guerre comme de fiscalité dont elle est souvent le corollaire, la responsabilité incombe de fait aux autorités locales, qu’elles soient municipales ou ecclésiastiques.
Néanmoins, la dégradation - par le bas - du corps social et l’éloignement de la plupart des élites revient à déterminer la question du financement des «secours sociaux»: non seulement la précarité est galopante mais elle se double d’une forte mobilité des populations. Les autorités ne font que décider d’opérer un tri par une préférence non pas nationale mais originelle afin d’éviter contestations, usurpations et surcharge des Tables des pauvres. La crise, sans toute fois préjuger qu’elle soit perçue comme telle, amène nécessairement un repli sur les communautés de part et d’autre des frontières, fussent-elles tracées arbitrairement à la lumière des traités aux dépends des réalités historiques, familiales ou affectives.

Le court préambule du règlement de 1750 ne fait que le préciser : «Comme il arrive journellement des difficultés sur l’entretien des pauvres entre les Magistrats des Chef-Collèges de la West-Flandre & de la Flandre Maritime, lesdits Magistrats pour éviter toute contestation, ont réglé et arrêté ce qui suit». Le but avoué est bien ici de faciliter les relations entre les institutions.


Des conditions d’aide définies comme un repli «communautaire»

L’article premier pose en préambule la difficulté du moment. Hormis les mendiants dont le statut est défini et accepté comme une quasi-profession, tous les ressortissants des deux régions concernées sont susceptibles d’avoir recours aux Tables des Pauvres afin d’assurer leur subsistance. «ARTICLE PREMIER. - Que toutes personnes soit natives de la West-Flandre, soit natives de la Flandre Maritime, mariées ou non mariées, ayant famille ou n’en n’ayant pas, pourront librement aller demeurer dans telle Ville, Bourg ou Paroisse desdits deux Départmens, qui conviendra mieux à leurs intérêts, sans être tenus de rapporter Acte de Garant à la décharge de la Table des Pauvres de leur nouvelle Demeure, pourvu que lesdites personnes soient porteurs d’un certificat en bonne forme du Curé & des Juges de leur dernier domicile, qui justifie de leur profession de la Religion Catholique, Apostolique & Romaine, & de leurs bonnes vie & mœurs, & qu’en outre ils ayent une profession, métier ou vacation au moyen de laquelle ils puissent s’entretenir eux & leur famille dans le lieu de leur nouvel établissement.»
Rien ne vient entraver la liberté de circulation tant que la survie économique est assurée. La frontière est perméable. Les autorités envisagent donc un déplacement de populations marginales. La référence au catholicisme romain ne peut apparaître que comme le garant du maintien d’un ordre social et moral, nécessaire dans une société où l’Eglise fournit la plupart des cadres.

La fermeture «officielle» de la frontière apparaît lorsque les difficultés se font connaître, et encore, elle ne concerne que les populations versant dans la précarité. Ainsi l’article II définit le retour des personnes qui ne sauraient assurer leurs subsistance par leurs propres moyens:

«II - Que toutes personnes natives de la West-Flandre ou de la Flandre Maritime y demeurantes, qui sont ou deviendront hors d’état à cause de leur incommodité, caducité, ou autre accident de gagner la vie, & d’y subsister avec leur famille, seront obligées de se retirer dans les lieux de leur naissance, pour y être entretenues ainsi que les autres pauvres, quand même ces mêmes personnes auroient été ou seroient secourues par quelque Table des Pauvres, en vertu de sentence ou en vertu de tel autre chef que cela pourroit avoir été fait.»

Le retour à la communauté originelle pose des problèmes car l’article III empêche toute mesure dérogatoire: «I I I - Au moyen de ce qui est statué ès articles précédens, tous Actes de garant ci-devant donnés par les directeurs des paroisses des departemens de la West-Flandre & de la Flandre maritime seront et demeureront nuls, & de nulle valeur & comme non avenus : défendons d’exiger & donner des actes de garant à l’avenir.»


Des conditions particulières restrictives

Les articles IV, V et VI ne font que régler les cas particuliers pour éviter les contestations. Ceci ne peut que permettre d’appréhender la démographie de la dernière moitié du XVIII° siècle:
«I V - Que les femmes et veuves suivront la condition de leurs maris & les enfans mineurs d’âge ou non mariés, celle de leurs pères & mères du vivant desdits pères ou mères; & en conséquence qu’une femme veuve ou ayant enfans d’un ou de plusieurs mariages précédens, tant elle que ses enfans mineurs d’âge & non mariés de quelque mariage qu’ils soient, seront entretenus même après la mort de son dernier mari si longtemps qu’elle demeurera en viduité par la Table des Pauvres du lieu de naissance du dernier mari; bien entendu, qu’après le décès de ce dernier mari & de la veuve, tous lesdits enfans seront renvoyés à la charge de la table des Pauvres du Lieu de la naissance de chacun d’eux respectivement, où seront aussi renvoyés pendant la vie desdits pères & mères les enfans majeurs d’âge & mariés.»
«V - Que la naissance casuelle ne donnera point d’alimentation, mais seront tels les enfans réputés natifs du lieu du domicile actuel de leurs pères & mères, du quel sera en ce cas fait mention dans les registres des baptêmes.»
«V I - Que tous les enfans bâtards sans exception ni distinction réputés natifs du lieu de la naissance de leurs mères, qu’ils suivront leur condition & devront être entretenus par la Table des pauvres du Lieu de la naissance de leurs dites Mères, soit filles ou veuves.»
Il semble donc que les cas dits «exceptionnels» n’en soient pas marginaux pour autant et que la recherche de filiation n’est pas des plus importantes.

Ce règlement a force de loi et vaut force de loi puisqu’il abroge, tel que le mentionne l’article 7, toutes les dispositions antérieures: «VII : Le présent règlement sera inviolablement observé & exécuté entre lesdits magistrats de la West-Flandre & de la Flandre Maritime, annullant tous les règlements antérieurs par eux faits contraires au présent: & touchant les difficultés qui pourroient naître par la fuite du tems sur l'exécution du présent règlement, Parties seront tenues de se pourvoir chacun devant son juge compétant, pour être par lui fait droit dans l’étendüe de son ressort, sans forme ni figure de procès & sans frais ainsi qu’il appartient»

Signalons d’ailleurs que la mobilité des populations est assez forte et dépasse largement le cadre des deux Flandre signataires, prévoyant l’extension et la collaboration avec le reste des territoires flamands, français ou non : «VIII : Déclarant les parties contractantes que le présent concordat ou règlement aura aussi lieu réciproquement à l’égard des autres magistrats de la Flandre orientale, wallonne ou rétrocédée, qui voudront y adhérer ou accéder, laquelle adhésion ou accession sortira son plein & entier effet à l’égard desdites parties contractantes, soit qu’elle se fasse à la réquisition des magistrats de la Flandre Maritime, soit qu’elle se fasse à la réquisition de l’un ou l’autre magistrat de la West-Flandre.»


Un règlement qui fait autorité en Flandre littorale

Le document initial date du 6 juin 1750 et concerne en premier lieu les Salle et Châtellenie d’Ypres, la Ville et Châtellenie de Furnes, la Ville et Châtellenie de Warneton, la Ville et Juridiction de Poperinge, la Ville et Territoire de Wervick, les échevinages et magistrats d’Ypres, de Flandre Maritime, auxquels d’ailleurs se joignent «les députés ordinaires aux états de la Ville de LILLE & châtellenies dudit LILLE, DOUAY & ORCHIES, qui ont vu & examiné le règlement ci-dessus, fait entre les magistrats des Chefs-Collèges de la West-Flandre & de la Flandre maritime, déclarant de l’approuver, & de vouloir bien s’y conformer, & consentent qu’il soit exécuté dans toutes les villes & communautés de leur Province : En foi de quoi, ils ont fait signer le présent acte par leur greffier dans l’Assemblée du vingt-deux may mil sept-cens cinquante.»

Très rapidement, le premier règlement fait autorité car on retrouve comme signataires «Messieurs du magistrat de la ville & châtellenie de Furnes avertissent tous ceux qu’il appartient que messieurs des magistrats des villes, châtellenies, pays et juridictions ci-dessous mentionnées, ont accédé au concordat du 6 juin 1750 qui précède, fait au sujet de l’Entretien des pauvres, afin que chacun s’y conforme, étant ordonné à tous les pauvriseurs & directeurs des Tables des Pauvres de la Châtellenie de conserver un exemplaire de cette ordonnance dans leurs archives. Fait au collège ce 25 juin 1761. L. STRABANT»

En quelques années, les villes et autorités importantes de Flandre Occidentale se joignent à la liste déjà importante des signataires: les villes de Roulers, de Loo, de Nieuport, de Bruges, de Dixmude en 1750, suivies de la Ville et Cité de Tournay en 1751, de la Ville de Menin, mais aussi des «Grand-Bailly & Echevins de la verge de Menin», en 1753. La même année les rejoignent la ville de Courtray, et aussi les «Haut-Pointers & francs-Echevins de la châtellenie de Courtray». Les difficultés n’ont dû cesser de croître, les moyens de se réduire car quelques années plus tard ce sont de nouvelles localités qui appliquent ce règlement: Ainsi en 1760 s’agrègent à ce groupe le Pays Franc de Bruges pour le Plat Pays du Franc, accompagnés des «territoires dépendants, annexes & contribuables dudit Pays du Franc»:
MERCKEM, HARDOYE, GUYSEN, COOLSCAMPS, ZYSSEELE, CAPRYCKE, RUDDERVOORDE, CORTEMARCQ & HANTSAEME, le PAYS de WYNENDAELE avec GHITS & WERCKEN, BEVEREN, suivis par le WATERLANDT, en 1761, par OOSTCAMP, en 1760, l’adhésion étant confirmée en cette année 1761, LICHTERVELDE, St. GEORGE.

Le règlement est d’ailleurs à nouveau «publié en la manière et place ordinaire, en présence de Messieurs NORBERT VAN VOSSEM & NORBERT VANDENABEELE, Echevins et Ceur-Heers de la ville de Furnes & Pays de Furne-Ambacht, [le] 8 juillet 1761». Les Magistrats d’Oudebourg les imitent et notifient leur décision aux magistrats de Furnes et de Nieuport la même année.
Très rapidement, c’est l’ensemble de la Grande Flandre qui est concernée en 1761: la ville et comté de Middelbourg, Damme, Houcke & Meunickenreede, les ville & port de Blanckenberghe, puis la ville de Ghistelle en 1762.


L’acte final est notifié à la Cour de Cassel. Par cette notification, on peut comprendre que le problème est considéré comme réel et préoccupant par la plupart des autorités locales. Les villes, échevinages et magistrats préfigurent en quelques années les états modernes dont l’action est conçue sur l’ensemble d’un territoire, avec la mise en relation des différents intervenants. Cependant, si peu de lieux de ce côté-ci de l’actuelle frontière sont évoqués, c’est surtout que l’organisation des Intendances mise en place depuis l’arrivée des Français permet de se passer de ces accords multilatéraux mais dont rien ne dit qu’elle fut effectivement efficace.

Discorde

Petite réflexion après ces longues semaines d'agitation sociale dans nos rues...

Ce monstre impétueux, sanguinaire, inflexible
De ses propres sujets est l'ennemi terrible:
Aux malheurs des mortels il borne ses desseins.
Le sang de son parti rougit souvent ses mains.
Il habite en tyran dans les coeurs qu'il déchire,
Et lui-même punit les forfaits qu'il inspire.
Son haleine en cent lieux répand l'aridité,
le fruit meurt en naissant, dans son germe infecté;
Les épis renversés sur la terre languissent;
Le ciel s'en obscurcit, les astres en pâlissent;
et la foudre en éclats qui grond sous ses pieds,
Semble annoncer la mort aux peuples effrayés.

Voltaire

archéologie de la nostalgie

En fait installée à Saint-Pol-sur-Mer, l'usine saint-Gobain ne survécut pas à la tempête d'acier de la dernière guerre. Durant des années, son squelette se dressait au dessus des toits de la commune et faisait les délices des enfants laissés à eux-même. On y venait pour épier les couples qui se cachaient dans les hautes herbes pour leur faire des farces pas toujours de très bon goût, les hangars devenaient de fantastiques terrains de jeu, les toits se transformaient en vigie d'où la vue était imprenable et surtout, l'on y chassait la grenouille. Jeux innocents d'enfants où l'aimable batracien finissait le plus souvent à gagner quelques tailles à l'aide d'un paille négligemment introduite dans le [Bip!] (NDLR: voile pudique jeté sur la scène tournée en sépia). Virent les années 80. Il fallait faire place nette. L'usine, réduite à une carcasse vide, telle le Léviathan au fond des mers, genaît et l'on décida, au début de la décennie de la dynamiter pour y élever des lotissements. Cela ne l'empêcha pas de résister puisqu'il fallu s'y reprendre à deux fois pour la dynamiter. C'est qu'elle ont la peau dure, ces vieilles usines...

Depuis lors? Que le souvenir et un quartier sans âme et sans verdure...

Dans son écrin de verdure et les miroirs d'eau, Bergues est une rêveuse qui puise ses songes au plus profond de son passé, protégée par ses murs séculaires et qui se sait attirante par ses atours ancestraux, les couleurs de ses toits et la chaleur de l'ocre de sa muraille.

Briques et eau: l'équation permanente de Bergues

L'Hôtel de ville d'Hondschoote, bijou architectural s'il en est, conserve en ses murs des merveilles. A l'étage, les archives et le musée sont relativement accessibles. Un conseil cependant, téléphonez à la mairie avant car, notamment avec les vacances, ce ne peut pas être ouvert tous les jours faute de personnel... Pas grave à la limite, la petite commune rurale reséerve assez d'attraits pour se promener ou projeter de revenir, d'autant plus qu'à la place, le personnel, charmant au demeurant, nous a fait entrer dans la salle des mariages où trône le fameux tableau de la bataille de septembre 1793 que le Ministre de l'Intérieur avait offert à la commune en 1839 à la demande du député Lamartine...

On repassera pour l'étage... Pas de souci...

H.Q.E.

La norme HQE (Haute Qualité Environnementale... pour les non initiés) n'a franchement rien de nouveau, cela fait des siècles qu'on l'applique dans la région, comme avec ce torchis à base de lin. Pour en savoir plus sur un matériau vivant, simple à mettre en oeuvre, souple dans sa fabrication, économique... et bon isolant, direction le Grenier du Lin et l'association Yser Houck, présidée par M. Felix Boutu!

Une visite du terroir d'Hondschoote s'imposait comme de pousser une pointe jusqu'au Grenier du Lin, accueil convivial, de bons conseils et un soin tout particulier pour que l'on se sente bien, comme chez des amis... Bref, une halte qu'il ne faut pas omettre de faire...

jeudi 20 avril 2006

Encore un rendez-vous incontournable. Pour l'ambiance, pour les lieux, pour la passion, deux solutions: Le Fort de Leveau ou le Fort de Seclin.
Voici que s'annonce le RATA DU POILU au Fort de Feignies (près de Maubeuge), un lieu exceptionnel, une ambiance d'enfer entre gens passionnés et simples amateurs où l'on peut se replonger dans l'histoire.N'hésitez pas à vous inscrire, ni le Fort ni l'équipe ne vous décevront...

Encore quelques jours de patience...


Un torpilleur de la Défense Mobile aux essais: machine à pleine puissance, drapeau noir sortant de la cheminée et proue fendant l'onde de toute sa puissance. Bientôt, les flottes qui croisent en mer du Nord auront un nouveau concurrent...

balade littéraire à Esquelbecq

Une randonnée pédestre d'environ 6 kms ponctuée d'une dizaine d'arrêts où des textes sur les couleurs sont lus, voila le parcours proposé par Blandine Ammeux et l’équipe de la Médiathèque d'Esquelbecq.

Il s'agit de la même balade qui avait été organisée dans le cadre de "Lire en fête" le 15 octobre dernier et qui sera proposée également le samedi 10 juin dans le cadre des "Talents du Canton" (5ème édition).
BALADE LITTERAIRE
à
ESQUELBECQ :
les couleurs

Organisée par l’équipe de la médiathèque
Samedi 13 mai 2006
ou samedi 10 juin 2006
Rendez-vous à la Maison du Westhoek à 15h45.
Départ 16 h précises.
Durée approximative 2h30.
Inscription obligatoire
par tél.03.28.62.49.51 ou 03.28.62.88.57
par mél. mediatheque.esquelbecq@wanadoo.fr
Et c’est gratuit !!!
La médiathèque se réserve la possibilité d’annuler en cas de pluie

Au bout de l'autoroute un sens giratoire incontournable pour qui entre dans l'agglomération dunkerquoise et qui provoque beaucoup de questions chez les primo-visiteurs, d'amusement et d'agacement chez les indigènes. Car quoi, ce sens giratoire célébre le carnaval (comme si on en mangeait pas assez pendant trois à quatre mois!) et represente des masquelours (des carnavaleux), des berguenaers (les parapluies) et des plumt'ches (des plumeaux), les deux derniers étant des ustensiles indispensables aux premiers... Bref, entre nous, on est nombreux à appeler ça le carrefour des cotons-tiges... Ah tradition, quand tu nous tiens!!!

Dans les jardins du Cercle Militaire de Lille se dresse fièrement un dragon. sabre à la main, il veille éternellement sur les abords, peut-être sur une frontière imaginaire. La statue équestre porte bien son nom: "en vedette", et à double titre car il patrouille en permanence juché sur son piedestal et attire le regard dans ce quartier qui change à vue d'oeil.

Un grand merci à l'encadrement du cercle qui m'a permis de faire ces photos en toute liberté.

Sous le soleil gris de la fin d'hiver...


Il est vrai que je passe rarement par là (il a suffit que je me trompe de route!) pour m'apercevoir que le Mongy avait été rénové. Finies les voitures brinquebalantes et bruyantes. elles sont remplacées par des trams très modernes... Malheureusement, ça ne ressemble plus au Mongy... Ils auraient pu lui rendre sa couleur rouge à laquelle tout le monde s'était habitué.

A proximité de l'emplacement de l'ancienne porte d'Ypres à Lille, sur le dernier bastion du rempart construit par Louis XIV (il faut descendre du côté des jardins familiaux pour le voir) se dresse le quartier Saint-Ruth, aujourd'hui état-major mais qui fut longtemps une caserne de cavalerie. D'un côté de la place d'armes, un bâtiment récent et de l'autre celui construit à l'origine (et je passe sur l'existence du gnouf préservé derrière celui-ci). Gigansteque batisse, la partie ancienne de Saint-Ruth n'est pas sans rappeler les façades de l'hospice saint-sauveur de l'autre côté de la ville louisquatorzienne...

Sacré Saint-Ruth, il manque devant le quartier un panneau qui lui fasse honneur. c'est que c'est officier du roi très chrétien portait bien son nom. Il reste des courriers de son épouse qui demande instamment à Louis XIV de l'envoyer se battre au loin, fatiguée qu'elle était de subir ses assiduités lorsqu'il était rendu à la vie civile...ce que ne manqua pas de faire le roi.

Enfin le Magasin Général se refait une beauté !

Monument emblématique à Lille, son histoire rima longtemps avec abandon. C'est qu'il n'a pas été épargné par les revirements. Construit à l'origine pour stocker les pieux de bois qui fraisaient la citadelle de Lille (des pieux qui servaient en temps de guerre à construire une palissade sur les murs et les demi-lunes de cette dernière), il perdit cette fonction lorsque la palissade devint permanente. De style français mâtiné de flamand avec ses multiples lucarnes, sa hauteur le laissait voir de loin au regard des maisons et hôtels particuliers qui l'entourent, concurrencé seulement par le clocher de la paroisse Saint-Sauveur. Il appartint ensuite à l'education Nationale qui y centralisaient les vivres pour les cantines puis fut abandonné. Vide, il pourrissait littéralement, les façades se noircissaient, devenaient lépreuses, les vitres se cassaient une à une... On fit le projet de le réaffecter... Les Archives départementales n'en voulurent pas : les planchers de chêne n'auraient pas supporté le poids des liasses... On le vendit pour en faire un hôtel de luxe, dans un quartier en pleine rénovation mais la vente fut cassée... Amiante, paraît-il... Les choses auraient pu en rester là... Pour finir on y creuse dans la cour un parking souterrain car le stationnement à Lille est un véritable calvaire... Par contre, pour ce qui est de l'intérieur, pas encore de nouvelle chez moi... Remarquons bien que, quoiqu'il s'y fasse, il était temps, de toute façon, qu'il retrouve son lustre, pour le plaisir des yeux et des historiens...

Un petit air de Hollande au coeur d'Halluin...

Le printemps revient et les travaux des champs recommencent. Comme tous les ans, les paysans transforment notre Flandre en jardins.