dimanche 30 octobre 2005

un tricentenaire, ça ne s'oublie pas...

Entré dans la Marine Royale à 15 ans, Marc-Antoine de Saint-Pol-Hécourt entame sa carrière sur les galères de Méditerranée dès 1681. En 1691, nommé Lieutenant de Vaisseau, il participe immédiatement à la campagne de Tourville contre les Anglais et se distingue à la bataille de La Hague. A 28 ans, il est nommé Capitaine des Vaisseaux à Dunkerque. Le voilà Corsaire du Roi !

Une carrière bien remplie
A peine arrivé, il commande la frégate de 44 canons Le Mignon et participe à la bataille du Texel. Il y prend le Stadenland, de 50 canons, après deux abordages, ne perdant que 7 hommes et 30 blessés... Du 20 au 26 juin 1694, son navire protège l’entrée du port de Dunkerque contre les attaques anglaises (représentée au musée des Beaux-Arts de Dunkerque par une grande fresque en faïence). La France connaît alors la famine : il participe à l’escorte de convois de blés venant de Suède..
L’année suivante, il se distingue encore : sa chaloupe détourne vers la plage à l’ouest du port les brûlots anglais, des navires démâtés et sans équipages qui doivent incendier la jetée. L’homme ne manque pas de suite dans les idées. En effet, le 18 juin 1696, à bord du Mignon, dont le gouvernail est brisé, il oblige le navire hollandais Saulsdeck, de 44 canons, à se rendre. On se canonne à bout pendant une demi-heure. L’année suivante, il commande le Gerzé dans l’Escorte du Prince de Conti à Dantzig (Gdansk) en 1697!


Le successeur naturel
Jean Bart tombe malade le 13 avril 1702.Il confie son commandement au Chevalier de Saint-Pol, plus ancien des Capitaines de Vaisseaux présents. La tâche est délicate : Jean Bart décède le 27 avril. Saint-Pol doit commander le Piquet d’Honneur lors des funérailles le 30. Pontchartrain, Ministre de la Marine, ne le nomme pourtant pas à la tête de l’escadre, il lui préfère le chef d’Escadre Desjean, baron de Pointis qui ne connaît rien à la guerre de course, L’escadre reste au port. A la fin de l’année, le chevalier de Saint-Pol le remplace !

En janvier 1703, il commande l’Adroit (30 canons). Avec le Milfort à ses côtés, il prend deux bâtiments anglais et surtout le Ludlow, une frégate forte de 160 hommes et 34 canons, dont il fait transporter l’équipage en Hollande. Un combat mouvementé : ce navire n’a été pris qu’au troisième abordage. Ses nombreuses prises lui valent en février d’être fait Chevalier de l’Ordre de Saint-Louis, l’équivalent de notre légion d’Honneur ! Autre moment de gloire: le 19 avril 1703, il s’empare du Salisbury, une frégate de 58 canons et de 320 hommes qui passe pour le meilleur navire anglais. Il en fait son navire-amiral. Le navire est tellement fin sur la mer que tous les arsenaux français en reçoivent les plans ! En octobre, la France n’est plus en guerre, il se consacre aux défenses du port.

En avril 1704, Louis XIV ordonne de recréer l’escadre mais, sans argent, il autorise le Chevalier de Saint-Pol à prendre des avances sur la vente des prises futures. Il les partage avec ses hommes. Toujours à la mer jusque novembre, il est poursuivi par les Anglais et les Hollandais, faisant de nombreuses prises. En mai 1705, il reprend la mer avec toujours plus d’audace : nombre de ses marins et canonniers sont récompensés par le roi.
En octobre, la croisière sur le Dogger Bank est fructueuse, ses bateaux huit navires anglais chargés de morue.


L’aube fatale
A l’aube du 31 octobre, Marc-Antoine de Saint-Pol-Hécourt voit à l’horizon un convoi de quinze navires marchands venant de la Baltique... mais ils sont escortés par des navires anglais : deux vaisseaux de 60 canons et un de 36 ! Fidèle à ses habitudes, il ordonne de prendre à l’abordage le vaisseau-amiral ennemi, le Pendenis mais au moment même où il donne son ordre, il reçoit une décharge de mousquet en pleine poitrine. Ses seconds continuent le combat et le gagnent

Le 3 novembre, la flotte dunkerquoise rentre avec ses prises et 900 prisonniers. Le Chevalier n’a pas été remis à la mer, son corps est resté à bord. On l’enterre le 6 novembre à l’église Saint-Eloi, dans la chapelle Saint-Georges avec les honneurs militaires. Ainsi finit le chevalier qui fut le Chef d’Escadre de Dunkerque sans en avoir le titre ni les émoluments. Il a pourtant pris plus de 150 bateaux de pêche et de nombreux navires de guerre. Quant au Salisbury, il ne resta pas longtemps français. Le 23 mars 1708, il est repris par les Anglais ; en 1716, il prend le nom d’H.M.S Preston et est coulé comme ponton (démâté et désarmé, il sert de caserne ou de prison) en 1748. A Versailles, deux tableaux de Th. Gudin peints au XIXe siècle (dont le dernier combat à bord du Salisbury), deux plaques (une à Flavières, l’autre à Saint-Eloi de Dunkerque), une cloche au beffroi de Saint-Pol et... le jacquemart en perpétuent le souvenir...


Retrouvez cet article dans le Phare Dunkerquois du 27 octobre 2005
correspondant-dmpa@tiscali.fr

Aucun commentaire: